Imaginez-vous en pleine préparation d’un match décisif, celui qui peut lancer votre compétition sur de bons rails. Et puis, d’un coup, une nouvelle tombe, brutale, inattendue. Elle fige tout le monde. C’est exactement ce qu’a vécu l’équipe de Côte d’Ivoire ces derniers jours. Le décès de Jean-Louis Gasset a secoué les Éléphants alors qu’ils s’apprêtent à affronter le Cameroun. Un choc qui transforme un simple rendez-vous sportif en quelque chose de bien plus grand.
Personnellement, quand j’ai appris la nouvelle, j’ai tout de suite repensé à cette CAN 2023 à domicile. Cette épopée folle, improbable, qui s’est terminée par un sacre inoubliable. Et je me suis dit que, quelque part, cet homme discret avait allumé la mèche, même s’il n’était plus là pour voir l’explosion finale.
Un hommage annoncé avant un choc brûlant
Dimanche, à Marrakech, le stade va vibrer pour bien plus qu’un simple match de groupe F. La Côte d’Ivoire, tenante du titre, veut rendre un hommage vibrant à son ancien sélectionneur. Les joueurs l’ont promis : ils vont jouer pour lui, avec lui dans le cœur. Et face à eux, il y aura le Cameroun, ce rival historique, ce « frère ennemi » comme certains aiment l’appeler.
Le timing est cruel. L’annonce est tombée vendredi matin, en plein stage de préparation. Au début, beaucoup ont cru à une rumeur, une de ces fausses informations qui circulent trop vite sur les réseaux. Puis la confirmation est arrivée. Et là, plus rien. Un silence lourd dans le groupe.
On a été dévastés d’apprendre ça hier. Ce sera une motivation supplémentaire de lui rendre hommage.
Guela Doué, défenseur des Éléphants
Ces mots résument bien l’état d’esprit. Une peine immense, mais aussi la volonté farouche de transformer cette douleur en énergie positive sur le terrain.
L’émotion palpable dans tout le camp ivoirien
L’actuel sélectionneur, Émerse Faé, était l’adjoint de Gasset lors de cette fameuse CAN 2023. Il connaît mieux que quiconque l’impact humain de l’homme. Il a décrit la nouvelle comme un véritable coup de massue. Tout le staff, les intendants, les médecins, les joueurs… presque tout le monde avait travaillé avec lui.
Le lendemain de l’annonce, avant l’entraînement, l’ensemble de la délégation s’est recueilli. Une minute de silence, longue, intense. Puis des applaudissements nourris. Un geste simple, mais chargé de sens. On sentait que l’équipe avait besoin de ça pour évacuer un peu la tristesse et se remettre au travail.
Ce qui frappe, c’est à quel point Gasset avait marqué les esprits. Pas seulement par ses choix tactiques, mais surtout par sa personnalité. On le décrit comme quelqu’un de bienveillant, à l’écoute, capable de créer du lien. Des qualités rares dans un milieu parfois très dur.
Retour sur l’aventure de 2023 : des débuts prometteurs à la démission
Pour bien comprendre l’émotion actuelle, il faut remonter deux ans en arrière. Jean-Louis Gasset arrive à la tête de la sélection ivoirienne en mai 2022. Un choix surprenant pour certains, mais qui va vite se justifier.
Il pose les bases d’un collectif solide. Les résultats sont là, la qualification pour la CAN à domicile est obtenue sans trop de soucis. Tout semble bien parti. Et puis arrive la compétition.
Les deux premiers matchs sont encourageants : une victoire, un nul. Mais le troisième tourne au cauchemar. Une défaite historique 4-0 contre la Guinée équatoriale. Les joueurs sont sonnés, le sélectionneur aussi. Dans le vestiaire, certains pleurent. Gasset, lui, prend une décision forte.
Quand je vois les joueurs dans le vestiaire en train de pleurer, ça me fait mal. On a tout donné, je pense.
Il présente sa démission quelques heures plus tard. Un geste rare en pleine compétition. Il explique vouloir provoquer un électrochoc. Il pense que son départ peut libérer le groupe, lui permettre de se surpasser sans la pression qu’il incarnait peut-être à ce moment-là.
Et le miracle va se produire. Émerse Faé prend les rênes. L’équipe, au bord de l’élimination, va réaliser une remontée fantastique. Qualification in extremis comme meilleur troisième, puis une série de victoires jusqu’au titre. Une épopée qui reste dans toutes les mémoires.
L’héritage incontestable de Gasset
Même s’il n’était plus sur le banc pour la finale, son rôle a été déterminant. La fédération ivoirienne l’a d’ailleurs souligné dans un communiqué émouvant : son passage a contribué de manière décisive au succès final.
Il avait bâti l’ossature de l’équipe, instauré une philosophie, créé des automatismes. Beaucoup de joueurs actuels étaient déjà là sous ses ordres. Ils gardent en mémoire ses entraînements, ses discours, sa façon de gérer le groupe.
- Il avait su intégrer les jeunes talents tout en s’appuyant sur les cadres.
- Ses schémas tactiques ont servi de base à la suite de l’aventure.
- Son humanité a marqué durablement les esprits.
D’une certaine manière, ce titre de 2023 porte aussi sa signature. Et c’est peut-être ce qui rend l’hommage actuel encore plus fort.
Un match Cameroun-Côte d’Ivoire sous haute tension émotionnelle
Maintenant, place au présent. La CAN 2025 est lancée, et ce duel face au Cameroun arrive très tôt. Les deux équipes font figure de favoris dans le groupe F. Un victoire lancerait idéalement la défense du titre pour les Ivoiriens.
Mais avec cette charge émotionnelle, rien ne sera simple. Les joueurs vont devoir gérer la peine, la fatigue mentale, tout en restant concentrés sur l’adversaire. Le Cameroun, lui, ne fera pas de cadeau. Cette rivalité historique transcende les générations.
On se souvient des duels épiques entre ces deux nations. Des finales, des demi-finales, des matchs toujours intenses. Cette fois, il y aura un ingrédient supplémentaire : l’envie de gagner pour quelqu’un qui n’est plus là physiquement, mais qui sera dans toutes les têtes.
Comment l’équipe peut-elle transformer la douleur en force ?
L’histoire du sport est remplie d’exemples où une épreuve personnelle ou collective a décuplé les forces d’un groupe. La Côte d’Ivoire l’a déjà prouvé en 2023, dans l’adversité après la lourde défaite.
Aujourd’hui, les circonstances sont différentes, mais le principe reste le même. Quand tout semble contre vous, c’est souvent là que naissent les plus belles performances. Les Éléphants ont cette capacité à se sublimer dans les moments difficiles. C’est dans leur ADN récent.
Émerse Faé, qui connaît parfaitement la maison, saura trouver les mots. Il a vécu les deux époques : celle avec Gasset, puis celle où il a pris la suite. Il incarne la continuité tout en ayant ajouté sa touche personnelle.
Ce que ce match pourrait signifier pour la suite
Une victoire dimanche serait plus qu’un simple résultat. Ce serait un message fort envoyé aux autres nations : la Côte d’Ivoire est toujours là, prête à défendre son bien. Et ce serait la plus belle façon d’honorer la mémoire de celui qui a cru en ce groupe dès le début.
Même en cas de résultat moins favorable, l’important sera ailleurs. Dans l’attitude, dans l’engagement, dans la communion avec les supporters qui, eux aussi, vont vivre ce moment avec une intensité particulière.
Le football africain a cela de magique : il transcende souvent le simple cadre sportif. Il porte des émotions nationales, des histoires personnelles, des hommages. Ce match en sera une illustration parfaite.
Pourquoi cet hommage touche au-delà du football ivoirien
Jean-Louis Gasset n’était pas ivoirien d’origine, mais il avait embrassé cette aventure avec une passion sincère. Il avait parlé du « challenge le plus important de sa vie ». Il s’était investi totalement.
Son histoire rappelle que le football est universel. Un entraîneur français qui marque à jamais l’histoire d’une nation africaine. Ces passerelles entre continents, ces échanges humains, c’est aussi ça la beauté du jeu.
Et puis, il y a cette humilité. Ce choix de partir au moment le plus difficile, pour le bien du groupe. Peu auraient osé. C’est une leçon de grandeur que beaucoup retiennent aujourd’hui.
Dimanche soir, quand les joueurs entreront sur la pelouse, ils porteront plus qu’un maillot. Ils porteront une mémoire, une reconnaissance, une envie folle de bien faire. Peu importe le score final, ce match restera gravé.
Parce qu’au-delà des trois points, il y aura cette dimension humaine qui fait que le football nous touche autant. Et quelque part, là-haut, un homme discret doit sûrement sourire en regardant ses anciens joueurs prêts à se battre pour lui.
C’est ça, aussi, la magie de la CAN.
