Vous est-il déjà arrivé de longer les Champs-Élysées en décembre, les yeux écarquillés devant cette mer de lumière, puis de tourner à l’Arc de Triomphe et… plouf, le noir total ? Moi oui, des dizaines de fois. L’avenue de la Grande-Armée, cette longue ligne droite qui file vers Neuilly et la Défense, faisait figure de parent pauvre de la féerie parisienne. Eh bien cette année, c’est fini. Le 4 décembre 2025, elle a enfin eu droit à ses illuminations de Noël. Et franchement, ça change tout.
Quand la Grande-Armée décide de briller à son tour
Imaginez la scène : il est 19 h 30, il fait un froid de canard, et pourtant des centaines de personnes sont massées sous l’Arc de Triomphe. Les enfants sur les épaules, les smartphones levés. Et puis d’un coup, les 800 mètres de l’avenue s’embrasent. Pas les feux d’artifice clinquants des Champs, non. Quelque chose de plus discret, presque chic : des voûtes lumineuses qui dessinent des arabesques au-dessus des têtes, des guirlandes qui soulignent les façades haussmanniennes, une lumière blanche et dorée qui réchauffe instantanément l’ambiance.
Pour les habitués du quartier, c’est presque irréel.
« On était dans le noir complet depuis des années. Là, on existe enfin sur la carte des illuminations ! »
– Une commerçante de l’avenue, les yeux brillants
Une première depuis… le siècle dernier
Oui, vous avez bien lu. La dernière fois que la Grande-Armée avait connu des illuminations de Noël, on était encore au XXe siècle. Les années 80-90, souvenirs flous de guirlandes un peu kitsch et de sapins fatigués. Depuis ? Rien. Zéro. Nada. Pendant que les Champs-Élysées devenaient la vitrine mondiale de Paris en décembre, que le boulevard Haussmann faisait rêver des millions de visiteurs avec ses vitrines animées, la Grande-Armée restait cette grande artère sombre, presque austère, qu’on traverse en vitesse pour rejoindre la Défense ou Neuilly.
Et pourtant, elle a tout pour plaire : 800 mètres de large trottoirs, des immeubles superbes, une situation stratégique entre l’Arc de Triomphe et la porte Maillot toute neuve. Alors pourquoi avoir attendu 2025 ?
Un quartier qui se réveille doucement
Il faut dire que la Grande-Armée traîne une image un peu particulière. On y vend des scooters, des motos, des plaques d’immatriculation, des pièces détachées. Un tiers des boutiques tournent autour de la mobilité, un autre tiers ce sont des restaurants, le reste c’est du classique : pharmacie, pressing, banque. Pas vraiment le glamour du triangle d’or.
Mais ça, c’était avant.
Depuis quelques années, les choses bougent. Création du Comité Grande-Armée en 2022, études pour réaménager l’avenue d’ici 2030, piétonnisation partielle, nouveaux concepts de restauration… Et maintenant ces illuminations. C’est clairement un signal : on veut transformer cette « autoroute urbaine » en vraie avenue vivante.
« On essaye de créer une vie de village dans un axe historique. »
– Un élu local, plutôt fier du résultat
L’effet boule de neige dans l’ouest parisien
Ce qui est intéressant, c’est que la Grande-Armée n’est pas seule. Le mouvement gagne tout l’ouest de la capitale. La rue de Passy s’y met, l’avenue Victor-Hugo aussi, l’avenue Kléber suit le pas. Bientôt, on pourra faire une vraie balade lumineuse continue de la Concorde jusqu’au bois de Boulogne. Ça, c’est du jamais-vu.
Et mine de rien, ça change la perception du XVIe et du XVIIe. Pendant longtemps, quand on parlait illuminations de Noël à Paris, on pensait immédiatement Champs-Élysées, boulevard Haussmann, Bercy Village ou Montmartre. L’ouest ? Bof. Là, ça rééquilibre la carte.
- Arc de Triomphe → Grande-Armée → Porte Maillot : tout est désormais relié par la lumière
- Les avenues rayonnantes (Victor-Hugo, Kléber, Foch) suivent le mouvement
- Même Neuilly commence à s’y mettre côté Hauts-de-Seine
L’enjeu économique derrière les guirlandes
Ne nous leurrons pas : si les commerçants se battent pour ces lumières, c’est aussi (surtout ?) pour le business. Le secteur du deux-roues a pris cher ces dernières années – stationnement payant, restrictions de circulation, ZFE… Beaucoup de boutiques ont vu leur chiffre fondre. Les illuminations, c’est l’espoir d’attirer enfin les promeneurs, ceux qui flânent, qui s’arrêtent prendre un chocolat chaud, qui entrent « juste pour voir » et qui ressortent avec un cadeau.
On voit l’exemple ailleurs : sur le boulevard Haussmann, on estime entre 200 000 et 300 000 visiteurs les week-ends de décembre. C’est plus que la tour Eiffel et le Louvre réunis sur la même période. Les grands magasins investissent des fortunes chaque année dans leurs vitrines animées et leurs sapins géants, parce qu’ils savent que ça paye.
La Grande-Armée n’a pas (encore) les moyens du Comité Champs-Élysées ou du Comité Haussmann. Mais le symbole est fort. Et qui sait, dans quelques années, on parlera peut-être d’un « triangle lumineux de l’ouest » comme on parle du triangle d’or.
Paris, ville lumière… mais pas pour tout le monde
Ce qui m’a frappé en discutant avec les acteurs du quartier, c’est cette petite pointe de frustration. Paris se vend comme la Ville Lumière, mais pendant longtemps, la lumière s’arrêtait net à l’Arc de Triomphe. Comme si tout ce qui était à l’ouest ne méritait pas le même traitement. C’est presque une question d’équité territoriale dans la capitale.
Aujourd’hui, avec ces nouvelles illuminations, c’est un peu comme si on réparait une injustice. Et ça fait du bien.
Et après ? Vers une vraie mutation de l’avenue
Les illuminations, c’est la partie visible de l’iceberg. Derrière, il y a tout un projet de transformation. On parle de réduire la place de la voiture, d’élargir les trottoirs, de planter des arbres, de créer des terrasses toute l’année. L’idée, c’est de faire de la Grande-Armée une avenue où on a envie de vivre, pas juste de passer.
D’ici 2030, le visage du quartier pourrait être méconnaissable. Et ces lumières de Noël 2025, c’est un peu l’acte I de cette renaissance.
Alors oui, ce n’est « que » des guirlandes. Mais parfois, c’est par des petits éclats de lumière qu’on redonne vie à toute une avenue. Et peut-être, à tout un quartier.
Si vous passez par là ces prochaines semaines, arrêtez-vous cinq minutes. Regardez en haut. Et souriez. Paris vient de gagner 800 mètres de magie supplémentaires.
Et vous, quelle est votre avenue préférée pour les illuminations ? Dites-le moi en commentaire, j’adore découvrir vos spots secrets dans Paris en décembre.
