Vous êtes-vous déjà demandé ce qui arriverait si un incendie se déclarait dans la ville la plus densément peuplée de la planète ? Mercredi 27 novembre 2025, Hongkong a vécu ce cauchemar bien réel. En quelques heures à peine, un feu d’une violence inouïe a englouti sept tours d’habitation, transformant un quartier ordinaire en scène apocalyptique. Et le pire, c’est que l’on commence seulement à comprendre pourquoi ça a dégénéré si vite.
J’ai suivi cette catastrophe en direct, comme beaucoup d’entre nous, et franchement, les images font mal au ventre. Des immeubles de trente étages qui brûlent comme des allumettes géantes, des habitants coincés aux fenêtres, des pompiers qui luttent toute la nuit… On se dit que ça n’arrive qu’ailleurs. Eh bien non, ça arrive aussi dans l’une des métropoles les plus modernes d’Asie.
Le pire incendie qu’ait connu Hongkong depuis des décennies
Le complexe résidentiel Wang Fuk Court, dans le quartier de Tai Po, compte huit tours construites en 1983. Près de 2 000 logements, des milliers d’habitants. Mercredi après-midi, un départ de feu – dont l’origine exacte reste floue – se déclare dans la première tour. En moins de deux heures, six autres bâtiments sont touchés. Sept sur huit. C’est du jamais-vu.
Jeudi matin, plus de vingt-quatre heures après, certains foyers brûlaient encore. Les pompiers continuaient d’arroser les façades noircies, la fumée montait toujours. Le niveau d’alerte 5, le maximum, avait été déclenché dès le début. Plus de 1 200 secouristes, 200 véhicules, une centaine d’ambulances. Un déploiement colossal.
Un bilan humain qui donne le vertige
À l’heure où j’écris ces lignes, on dénombre officiellement 75 morts, dont un pompier de 37 ans qui a perdu la vie en tentant de sauver des habitants. Mais le chiffre qui glace le sang, c’est celui des disparus : plus de 250 personnes n’ont toujours pas été retrouvées. Et parmi elles, beaucoup d’enfants et de personnes âgées.
Certains témoignages sont déchirants. Une femme attend toujours des nouvelles de sa sœur et de son beau-frère. Elle a tenté de les appeler des dizaines de fois, rien. Elle a regardé les photos des corps identifiés affichées par les autorités, rien non plus. « Il y avait des enfants », a-t-elle murmuré, la voix brisée.
« Certaines personnes ignoraient qu’il y avait le feu. Elles ont dû être prévenues par téléphone par leurs voisins. »
Un habitant du quartier, 65 ans, résident depuis plus de quarante ans
Beaucoup de retraités vivent dans ces tours des années 80. L’après-midi, ils étaient chez eux. Certains à mobilité réduite, d’autres sourds aux sirènes. Quand le feu a atteint les étages supérieurs, il était parfois déjà trop tard.
Pourquoi le feu s’est propagé aussi vite ?
La réponse tient en trois mots : échafaudages en bambou. À Hongkong, c’est une tradition séculaire. On monte les échafaudages avec des perches de bambou liées entre elles, légères, flexibles, moins chères que l’acier. Sauf que là, les tours étaient en rénovation. Toute la façade était recouverte de ces structures, enveloppées de bâches plastiques et de filets de protection.
Et devinez quoi ? Beaucoup de ces matériaux ne respectaient pas les normes anti-feu. Le feu a grimpé le long des échafaudages comme dans une cheminée géante, passant d’étage en étage, de tour en tour. Un véritable effet torche.
- Échafaudages en bambou hautement inflammables
- Bâches et filets en plastique qui fondent et alimentent le feu
- Matériaux de chantier abandonnés un peu partout
- Vents à 14 km/h qui poussent les flammes d’un bâtiment à l’autre
Cerise sur le gâteau : depuis plusieurs jours, Hongkong était en alerte rouge incendie, le niveau maximal. Taux d’humidité record à la baisse (16 %, le plus bas jamais mesuré), vent soutenu… Toutes les conditions étaient réunies pour une catastrophe.
Des arrestations et une enquête pour corruption
La police n’a pas perdu de temps. Trois responsables de l’entreprise chargée des travaux ont été arrêtés dès le lendemain. Motif ? Négligence grave. On a retrouvé sur place des matériaux inflammables stockés n’importe comment. Ils risquent des poursuites pour homicide involontaire.
Et ce n’est que le début. Une enquête anticorruption a été ouverte. À Hongkong, les chantiers sont souvent un nid à magouilles : sous-traitance opaque, matériaux bas de gamme pour gonfler les marges… Cette fois, le prix payé est terrifiant.
Hongkong, une poudrière urbaine
Il y a un mot qui revient tout le temps quand on parle de Hongkong : densité. 7,5 millions d’habitants sur à peine 1 100 km², dont une grande partie est montagneuse et inhabitable. Résultat ? Dans les zones urbanisées, on dépasse facilement les 20 000 habitants au km², parfois bien plus. Un record mondial.
Et dans cette forêt de gratte-ciel – Hongkong en compte plus de 560 de plus de 150 mètres, plus que n’importe quelle autre ville –, l’espace est une denrée rare. Les immeubles sont collés les uns aux autres, parfois à quelques mètres seulement. Quand le feu prend dans l’un, les autres deviennent des cibles faciles.
Ajoutez à cela des constructions des années 70-80 qui n’ont pas toujours été modernisées en matière de sécurité incendie, et vous avez une bombe à retardement. Ce qui s’est passé à Wang Fuk Court n’est pas un accident isolé ; c’est un avertissement.
La solidarité qui réchauffe le cœur
Dans la tragédie, il y a quand même des lueurs d’espoir. Dès les premières heures, des centaines de volontaires se sont mobilisés. Eau, couvertures, matelas, nourriture… Les habitants du quartier ont tout apporté. Des chaînes humaines pour évacuer les personnes âgées ou handicapées. Des jeunes qui guidaient les pompiers dans les escaliers enfumés.
« Certaines personnes étaient vraiment effrayées. On a fait ce qu’on a pu pour les sortir. »
Un bénévole présent sur place
Même à l’échelle internationale, les messages de soutien affluent. Des condoléances officielles, des dons, des propositions d’aide technique pour l’enquête. Parce que oui, ce drame dépasse largement les frontières de Hongkong.
Et maintenant ?
La grande question, c’est : est-ce que cette catastrophe va enfin pousser les autorités à agir ? Révision des normes sur les échafaudages en bambou ? Contrôles renforcés sur les chantiers ? Modernisation des vieux immeubles ? On l’espère tous.
Parce que si rien ne change, rien ne garantit que ça ne se reproduira pas. Hongkong est une ville magnifique, vibrante, mais elle vit aussi sur un fil. Ce feu géant vient cruellement nous le rappeler.
En attendant, les familles continuent de chercher leurs proches. Les pompiers fouillent encore les décombres. Et nous, on regarde ces images en se disant que la sécurité incendie dans les mégapoles, ce n’est pas une option. C’est une urgence absolue.
Ce drame me laisse un goût amer. On construit toujours plus haut, toujours plus dense, toujours plus vite… mais à quel prix ? J’espère sincèrement que les leçons de cette tragédie seront tirées. Pour que plus jamais on n’ait à compter 75 morts et 250 disparus à cause d’un feu qui aurait pu être contenu.
Prenez soin de vous. Et si vous habitez un immeuble ancien, vérifiez les issues de secours. On ne sait jamais.
