Vous êtes tranquillement chez vous, vous rigolez avec un pote devant la caméra, vous balancez une petite vanne sur le palmarès d’une sélection adverse et, vingt-quatre heures plus tard, votre boîte Instagram ressemble à une poubelle remplie de haine. C’est exactement ce qui est arrivé à Nicolas Pépé il y a quelques jours. Une simple blague, un peu exagérée certes, et boum : avalanche d’insultes racistes. Franchement, ça fait froid dans le dos.
Je suis fan de foot depuis toujours, j’ai vu des rivalités enflammées, des derbys qui font trembler les murs, mais là… on touche à quelque chose de profondément nauséabond. Le football africain, censé être une fête, un moment d’unité, se retrouve encore sali par des comportements qu’on croyait appartenir à une autre époque.
Quand une blague devient un déferlement de haine
Tout part d’une vidéo tournée avec un créateur de contenu très connu dans le Maghreb. L’ambiance est détendue, on chambre tout le monde : l’Algérie, la Côte d’Ivoire, le Maroc… Rien de bien méchant, le genre de taquineries qu’on entend dans n’importe quel café sportif à Abidjan ou à Casablanca.
Pépé, fier de ses trois étoiles fraîchement gagnées en 2024, lance avec le sourire : « Les Marocains, ils ont combien d’étoiles déjà ? Une ? Ça doit remonter à avant la naissance de mon père ! » Bon, clairement, il force le trait. Tout le monde sait que le Maroc a remporté la CAN en 1976. C’était de l’humour, de l’exagération volontaire, le genre de phrase qui fait rire dans une conversation entre potes.
Mais sur Internet, l’humour a parfois la durée de vie d’un papillon. En quelques heures, des milliers de comptes se sont acharnés sur l’ailier ivoirien. Pas juste des critiques sur sa blague, non. Des messages racistes, des attaques sur sa couleur de peau, sur ses origines, des mots que je ne répéterai même pas ici. C’est violent, gratuit, et surtout profondément lâche derrière un écran.
Le poids des mots quand on est champion d’Afrique
Nicolas Pépé n’est pas n’importe qui. Il porte le maillot d’une nation qui vient de remporter la CAN à domicile, il a été décisif, il a marqué les esprits. Quand tu es à ce niveau, chaque mot est scruté, disséqué, parfois détourné. Un peu comme si on t’interdisait le droit à l’humour sous peine de se faire lyncher.
Et là, je me pose la question : est-ce qu’un joueur marocain aurait subi la même chose s’il avait chambré la Côte d’Ivoire de la même manière ? J’ai comme un doute. Le racisme anti-Noir reste une réalité brûlante dans certaines parties du Maghreb, et les réseaux sociaux sont devenus le terrain parfait pour laisser exploser cette haine sans conséquence.
« Navré si mes mots ont pu être mal interprétés… On est tous ensemble, continent africain oblige. Force à tous et F* le racisme. »
Nicolas Pépé, sur ses stories Instagram
Sa réaction ? Classe, posée, digne. Il aurait pu répondre sur le même ton, rentrer dans le jeu de la provocation. Il a choisi l’apaisement. Et ça, mine de rien, c’est une leçon pour tout le monde.
Un soutien massif qui réchauffe le cœur
Face à cette vague nauséabonde, la solidarité a été immédiate. Des joueurs sénégalais, français d’origine africaine, mais aussi des Maghrébins ont pris la parole pour défendre Pépé. Pape Gueye, Lamine Camara, Khéphren Thuram… Des messages simples mais puissants : « Le racisme n’a pas sa place ».
- Des centaines de supporters marocains (les vrais) qui ont condamné ces agissements
- Des influenceurs maghrébins qui ont rappelé que le football doit rester un jeu
- Même certains médias locaux qui ont titré sur la honte de ces comportements
Parce qu’il ne faut pas tout mélanger. La majorité des supporters marocains, ceux qui remplissent les stades, qui vibrent pour leurs Lions de l’Atlas, ne se reconnaissent pas dans ces excités du clavier.
Le racisme en ligne, ce fléau qui ne désarme pas
Ce n’est malheureusement pas la première fois. On se souvient des singeries envers Vinicius Junior en Espagne, des bananes lancées, des insultes sur les réseaux. En Afrique, le problème est peut-être encore plus tabou. On parle peu du racisme intra-africain, surtout quand il vient du nord vers le sud du continent.
Pourtant, les exemples sont là. Mike Maignan qui se fait insulter à chacun de ses déplacements dans certains stades. Les joueurs subsahariens qui évoluent dans des championnats maghrébins et qui racontent, en off, les remarques quotidiennes. C’est une réalité qu’on préfère souvent ignorer pour ne pas « diviser » le continent.
Mais ignorer, c’est accepter. Et là, avec l’affaire Pépé, on touche le fond. Une blague sur un titre gagné il y a presque 50 ans suffit à déclencher ça ? Sérieusement ?
La CAN 2025 au Maroc : un contexte explosif
Et le pire, c’est que la Côte d’Ivoire va justement jouer ses matchs de poule au Maroc. Imaginez l’ambiance. Nicolas Pépé qui pose le pied à Casablanca ou à Tanger, avec dans un coin de la foule des individus qui ont écrit les pires horreurs sous ses photos. Ça donne des frissons.
Les autorités marocaines ont intérêt à être vigilantes. Pas seulement dans les stades, mais aussi en ligne. Bloquer les comptes, identifier les auteurs, montrer que ce genre de comportement ne passe plus. Parce que la CAN, c’est la fête du football africain. Pas un défouloir raciste.
Et nous, supporters, on fait quoi ?
À un moment, il faut aussi se regarder dans la glace. Moi le premier. Quand on chambre l’adversaire, quand on pousse la rivalité, où est la limite ? Est-ce qu’on participe, sans le vouloir, à créer un climat où certains se sentent autorisés à franchir la ligne rouge ?
Le football africain a cette force incroyable : il rassemble des peuples, des cultures, des religions. On pleure ensemble quand une équipe gagne, on souffre ensemble quand elle perd. Alors pourquoi, bordel, on arrive encore à se déchirer pour des étoiles sur un maillot ?
J’ai envie de croire que cette histoire aura au moins un mérite : ouvrir les yeux. Faire prendre conscience que derrière chaque joueur, il y a un être humain. Que la rivalité, oui, mais la haine, jamais.
Vers une CAN plus propre ?
La prochaine Coupe d’Afrique des Nations approche à grands pas. Les Éléphants vont défendre leur titre, les Lions de l’Atlas vont vouloir briller à domicile. Ce serait beau que cette compétition reste dans les mémoires pour le jeu, les exploits, les larmes de joie. Pas pour des scandales racistes.
Nicolas Pépé a montré la voie : répondre à la haine par la dignité. À nous maintenant, supporters, influenceurs, journalistes, de faire en sorte que ce genre d’histoire ne se répète plus. Parce que le football africain mérite mieux. Infiniment mieux.
Allez, on se retrouve sur les pelouses. Et on laisse la haine au vestiaire.
