Vous vous souvenez de ce sentiment, l’an dernier vers janvier ? Cette impression que La Rochelle, pourtant double championne d’Europe en titre, glissait doucement vers le vide ? On y est presque. Deux défaites de rang, une infirmerie longue comme un jour sans pain et un calendrier qui ressemble à une ascension de l’Everest. Frissons garantis.
Un début de saison qui part en fumée
Tout avait pourtant plutôt bien commencé. Sixième place, 26 points, un jeu qui tournait à peu près correctement et cette forteresse Deflandre qui tenait encore la route. Et puis patatras : la gifle à Toulon (39-14), suivie d’une défaite à domicile contre Castres, chez eux, devant leur public. Perdus 17-19 alors qu’ils ont joué plus d’une demi-heure en supériorité numérique. C’est le genre de match qui laisse des traces.
Le pire ? Même à 15 contre 12 pendant un moment, les Maritimes n’ont jamais vraiment donné l’impression de pouvoir renverser la table. « Une claque », ont lâché les joueurs dans le vestiaire. Et quand tu prends une claque à la maison, ça fait toujours plus mal.
« Nous n’étions clairement pas à notre niveau. »
Donnacha Ryan, entraîneur des avants
L’ombre de la saison dernière plane
À la même époque l’an dernier, La Rochelle avait… 28 points. Deux de plus. Et on sait tous ce qui s’est passé ensuite : neuf matchs sans victoire entre janvier et avril, huit défaites, un nul, et hop, septième place, première non-qualification en phase finale depuis 2018. Autant dire une éternité pour un club habitué aux demies et aux titres européens.
Aujourd’hui, on est à peu ou prou au même point. Avec deux points de moins et déjà deux défaites consécutives dans les jambes. La grande question que tout le monde se pose dans les travées de Deflandre : et si l’histoire se répétait ?
Une infirmerie qui ne désemplit pas
Là où ça coince vraiment, c’est l’état de l’effectif. Douze joueurs à l’infirmerie pour le déplacement à Pau, c’est énorme. Et pas n’importe qui :
- Uini Atonio (pilier droit, retour espéré fin d’année)
- Pierre Bourgarit (talonneur titulaire)
- Will Skelton (monstre en deuxième ligne)
- Paul Boudehent (troisième ligne, minimum un mois)
- Nolann Le Garrec (demi de mêlée, possible reprise en Champions Cup)
- Jonathan Danty (centre, saison terminée)
- Semi Lagivala (centre, trois mois minimum)
Résultat : le club a dû recruter en urgence Adrien Seguret comme joker médical. Il sera titulaire dès ce dimanche à Pau, aux côtés d’Ulupano Seuteni. Quand tu dois faire débuter un joueur arrivé il y a quinze jours au centre, c’est que ça sent le roussi.
Un calendrier qui fait peur
Et puis il y a ce programme à venir. Franchement, on dirait un mauvais scénario écrit exprès pour faire plonger l’équipe :
- Déplacement à Pau (2e du championnat, en pleine confiance)
- Réception de Leicester en Champions Cup
- Voyage en Afrique du Sud chez les Stormers (avec l’idée initiale de faire tourner… plus trop possible)
- Bloc festif infernal : Bayonne (domicile), Toulouse (déplacement), Toulon (domicile)
- Nouvelle quinzaine européenne : déplacement au Leinster + réception des Harlequins
Autant dire que si La Rochelle prend une troisième défaite dimanche soir à Pau, le moral risque d’être au plus bas avant d’attaquer ce marathon. Et on sait tous ce que donnent les marathons quand tu pars déjà sur une jambe.
« Si on joue comme contre Castres, à Pau, ça peut être une démolition. »
Ronan O’Gara, après la défaite contre Castres
Les retours d’Alldritt et Jegou : une éclaircie ?
Heureusement, tout n’est pas noir. Grégory Alldritt et Oscar Jegou reviennent de sélection et seront titulaires en troisième ligne. Deux leaders, deux joueurs d’énergie, deux positifs dans un océan de négatif. Donnacha Ryan le disait lui-même : « C’est toujours bien de les avoir dans le bâtiment, ce sont deux mecs très positifs. »
Mais est-ce que deux joueurs, même exceptionnels, suffisent à renverser une dynamique ? J’ai un gros doute. Surtout quand ton capitaine revient après une tournée et que tu lui colles 80 minutes dès le premier match à Pau, sur un terrain lourd, contre une équipe qui vole en ce moment.
Pau, la montagne qui peut tout faire basculer
La Section Paloise version 2025, c’est costaud. Deuxième du classement, jeu rapide, pack dominateur à domicile, public chaud bouillant. Les Rochelais eux-mêmes parlent sur leur site d’une « montagne à gravir ». Ils n’ont pas tort.
Une défaite là-bas et c’est la crise ouverte. Trois revers de suite, un effectif décimé, et ce fichu calendrier qui arrive comme un rouleau compresseur. À l’inverse, une victoire (même moche, même avec le bonus défensif) pourrait relancer la machine et redonner de l’air avant la Champions Cup.
Et si c’était le début de la fin ?
Je ne vais pas vous mentir : j’ai peur. Vraiment. Parce que tout ressemble étrangement à l’an dernier. Le même nombre de points à peu près, les mêmes blessures à des postes clés, le même calendrier monstrueux avec les doublons qui arrivent, et surtout cette impression que l’équipe n’y est plus mentalement.
L’an dernier, le trou d’air est arrivé un peu plus tard, vers janvier. Mais les signaux étaient déjà là. Là, on est fin novembre et on a déjà l’impression que le bateau prend l’eau de toute part.
Après, le Stade Rochelais nous a habitués à des résurrections improbables. Souvenez-vous 2021-2022, 2022-2023 : l’équipe était souvent mal embarquée en championnat avant de tout renverser au printemps. Mais cette fois, j’ai comme un doute. L’effectif semble plus touché, les leaders plus usés, et la concurrence en Top 14 jamais aussi dense.
Alors oui, il reste beaucoup de matchs. Oui, tout peut basculer en une victoire référence. Mais pour l’instant, franchement, ça sent le sapin. Et si dimanche soir à Pau tourne mal, attachez vos ceintures : on risque de vivre un hiver très très long à La Rochelle.
Allez, on croise les doigts. Parce que le rugby sans une grosse Rochelle en phase finale, c’est quand même beaucoup moins drôle.
