Vous avez tous en tête cette vasque olympique qui flottait dans le ciel parisien comme un soleil captif. Magnifique, poétique, futuriste. Mais quand on vous dit qu’elle rend hommage à un événement précis de 1783, combien d’entre vous savent vraiment de quoi il s’agit ? Moi le premier, je l’avoue, j’ai dû creuser.
Et là, surprise : ce n’est pas aux frères Montgolfier que l’on doit l’inspiration directe, même si tout le monde pense à eux quand on parle de ballon. Non, la vasque célèbre autre chose. Une aventure plus discrète, plus scientifique, et pourtant révolutionnaire. Un vol qui a eu lieu un froid matin de décembre, il y a exactement 242 ans aujourd’hui.
Le vol qui a changé la perception du ciel
Le 1er décembre 1783, à 13 h 45 précises, un ballon rempli d’hydrogène s’élève lentement du jardin des Tuileries. À son bord : Jacques Charles, physicien brillant, et Marie-Noël Robert, un mécanicien audacieux. Cent mille personnes retiennent leur souffle sur le parvis. Benjamin Franklin, ambassadeur des États-Unis, est dans la foule et note dans son carnet : « C’est magnifique. »
Ils volent pendant plus de deux heures, parcourent 36 kilomètres et atteignent une altitude jamais enregistrée pour des humains : près de 3 000 mètres. Le froid est mordant, le silence total. Pour la première fois, des hommes contemplent la courbure de la Terre et les nuages… par en dessous.
Pourquoi tout le monde parle des Montgolfier et pas d’eux ?
C’est la grande question. Les frères Montgolfier ont eu le génie du spectacle : leur montgolfière vole dès juin 1783 devant le roi à Versailles, avec un coq, un canard et un mouton. L’image est forte, populaire, royale. Leur second vol habité, le 21 novembre, avec Pilâtre de Rozier et le marquis d’Arlandes, passe au-dessus de Paris. C’est l’événement people du siècle.
Dix jours plus tard, Charles et Robert font mieux techniquement : leur ballon est plus léger, plus maniable, utilise un gaz levant (l’hydrogène) au lieu de l’air chaud, et surtout, ils contrôlent l’altitude avec une soupape et des sacs de lest. C’est déjà le ballon moderne, celui qu’on utilise encore aujourd’hui pour les vols scientifiques ou touristiques.
« Leur invention était parfaite. Le principe n’a pratiquement pas changé en deux siècles et demi. »
Un passionné qui se bat depuis trente ans pour que cet exploit soit reconnu
L’atterrissage mouvementé à Nesles-la-Vallée
Après deux heures de vol, le ballon redescend près de Nesles-la-Vallée, dans le Val-d’Oise actuel. Jacques Charles quitte la nacelle pour alléger l’appareil. Marie-Noël Robert reste seul à bord… et le ballon repart violemment vers le ciel, jusqu’à 3 500 mètres. Panique totale.
Robert parvient à ouvrir la soupape, redescend en catastrophe et atterrit neuf kilomètres plus loin, à Tournepie. Les paysans du coin, terrifiés par ce « monstre » tombé du ciel, s’approchent avec fourches et faux. Heureusement, Robert s’en sort avec quelques verres de vin et des explications.
Cette anecdote, presque comique aujourd’hui, montre à quel point l’événement a marqué les esprits locaux. Pourtant, dans les livres d’histoire scolaires, on retient surtout les Montgolfier.
La vasque olympique, un hommage discret mais puissant
Lorsque les organisateurs des Jeux de Paris cherchaient un symbole fort, ils se sont tournés vers ce vol précis. Pourquoi ? Parce qu’il partait exactement du même endroit : le jardin des Tuileries. Et parce que la vasque, avec son cercle de feu suspendu et son ballon captif lumineux, rappelle directement la forme du globe de Charles et Robert.
Le designer parlait d’un « hommage à l’esprit des Lumières et à la conquête du ciel ». Des millions de spectateurs ont applaudi sans forcément comprendre la référence. C’est un peu triste, non ? Un exploit français fondamental reste dans l’ombre de ses prédécesseurs plus médiatisés.
- Premier vol contrôlé en altitude
- Utilisation de l’hydrogène comme gaz levant
- Invention de la soupape de manœuvre et du lest
- Premières observations scientifiques depuis les airs
- Base technique de tous les ballons modernes
Des passionnés refusent l’oubli
À Nesles-la-Vallée, une poignée d’habitants et d’historiens se battent depuis des années. Une stèle discrète, une plaque, quelques cérémonies annuelles. L’auteur d’un livre consacré au sujet avoue être « fatigué de répéter la même chose » : oui, les Montgolfier ont ouvert la voie, mais Charles et Robert ont construit la route.
Des projets existent : un musée de l’aérostation, un sentier historique entre les lieux d’atterrissage, des vols commémoratifs. L’idée fait doucement son chemin, boostée par la visibilité olympique. Peut-être que 2025 sera enfin l’année de la réhabilitation.
Et nous, que peut-on faire ?
Parler de cet exploit, tout simplement. Le raconter à ses enfants quand ils demandent d’où vient la vasque. Aller se balader à Nesles-la-Vallée un week-end, chercher la stèle au milieu des champs. Lire les récits d’époque, incroyablement vivants.
Parce que l’histoire de l’aviation ne commence pas avec les frères Wright en 1903. Elle commence ici, en France, par un matin glacé de 1783, avec deux hommes qui ont osé regarder le monde d’en haut pour la première fois.
La prochaine fois que vous reverrez des images de la vasque olympique flottant dans la nuit parisienne, pensez à eux. À Jacques Charles et Marie-Noël Robert. Ils le méritent bien.
Et vous, saviez-vous que la vasque olympique cachait une histoire aussi précise ? Dites-le moi en commentaire, j’ai envie de savoir si je suis le seul à avoir découvert ça aussi tardivement…
