Il est des nominations qui font l’effet d’une petite bombe dans le microcosme politique. Le 12 octobre dernier, en pleine soirée, les téléphones des députés du groupe centriste et indépendant ont vibré presque en même temps. Leur président venait d’annoncer qu’il quittait son poste pour entrer au gouvernement. Laurent Panifous, ancien socialiste landais, devenait ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement. Beaucoup ont haussé les sourcils. Lui-même, dans son message d’adieu, semblait presque s’excuser d’avoir accepté.
Deux mois plus tard, personne ne rit plus. L’homme discret est devenu l’un des rouages essentiels d’un exécutif qui navigue à vue. Sans majorité absolue, sans arme nucléaire du 49.3 pour le budget, il doit faire adopter les lois les plus sensibles de la législature. Et pour l’instant, il y arrive. Plutôt impressionnant, non ?
Un ministre qui écoute plus qu’il ne parle
Dans l’organigramme gouvernemental, le poste de ministre des Relations avec le Parlement a toujours été un peu particulier. Ni tout à fait politique, ni tout à fait technique. On y passe, on y brille parfois, on y disparaît souvent. Mais quand la majorité est fragile, le titulaire du maroquin devient soudain précieux. Très précieux même.
Laurent Panifous l’a bien compris. Ceux qui le connaissent décrivent un homme calme, méthodique, capable d’écouter pendant des heures sans interrompre. « Il a une patience d’ange et une mémoire d’éléphant », confie un député de l’opposition qui a déjà négocié avec lui. Des qualités rares dans un hémicycle où tout le monde veut parler en même temps.
« Le ministre des Relations avec le Parlement, c’est les yeux et les oreilles du Premier ministre. Il faut capter les signaux faibles, sentir d’où vient le vent avant même qu’il ne souffle vraiment. »
Laurent Panifous lui-même, en privé
D’un groupe indépendant à la table du gouvernement
Revenons un peu en arrière. Avant octobre 2025, Laurent Panifous présidait le groupe LIOT à l’Assemblée nationale. Une vingtaine de députés, venus d’horizons divers – anciens socialistes, centristes, corses, ultramarins… Un groupe hétéroclite, souvent courtisé, parfois craint, car il pouvait faire basculer bien des scrutins.
Son parcours n’avait pourtant rien de flamboyant. Élu député en 2017 sous l’étiquette socialiste dans les Landes, il avait suivi le mouvement de beaucoup de ses collègues : rupture avec le PS après la présidentielle, puis création d’un nouveau groupe pour garder une forme d’indépendance. Discret dans les médias, il s’était fait remarquer par sa capacité à construire des compromis là où d’autres voyaient des murs.
Quand la proposition arrive, début octobre, elle ressemble à un piège autant qu’à une opportunité. Accepter, c’est trahir une partie de ses convictions passées. Refuser, c’est peut-être rater la chance de peser vraiment. Il choisit d’y aller. Et, franchement, on peut comprendre les deux lectures possibles de ce choix.
La mission impossible du budget sans 49.3
On est début décembre. Le projet de loi de finances pour 2026 est en discussion. Normalement, dans ce genre de situation, le gouvernement dégaine l’article 49 alinéa 3, impose son texte et passe à autre chose. Sauf que cette fois, le président de la République a promis qu’on essayerait sans. Promesse tenue… pour l’instant.
Du coup, tout repose sur les négociations. Et qui négocie ? Laurent Panifous. Matin, midi, soir, parfois tard dans la nuit. Avec les socialistes pour tenter d’obtenir leur abstention. Avec certains républicains qui hésitent encore. Avec les écologistes sur des amendements précis. Avec les centristes pour ne pas les braquer. Un véritable marathon.
- Rendez-vous discrets dans les bureaux de l’Assemblée
- Coups de fil aux présidents de groupe à toute heure
- Petits-déjeuners de travail avant les questions au gouvernement
- Réunions à Matignon jusque tard le soir
- Et entre deux, les allers-retours dans l’hémicycle pour sentir l’ambiance
Le résultat ? Pour l’instant, le texte avance. Lentement, péniblement, mais il avance. Et personne n’a encore claqué la porte. C’est déjà une petite victoire dans le contexte actuel.
Un style qui détonne dans le paysage politique
Ce qui frappe quand on observe Laurent Panifous, c’est son absence totale de frime. Pas de grandes déclarations tonitruantes sur les plateaux télé. Pas de tweets assassins à 6 heures du matin. Il travaille, il discute, il écoute. Point.
Dans une majorité où certains ministres adorent les caméras, ça change. Et ça fonctionne. Parce que les députés, même ceux de l’opposition, savent qu’ils peuvent lui parler franchement. Qu’il ne les trahira pas dans la presse le lendemain. La confiance, en politique, c’est une denrée rare. Lui semble en avoir encore un petit stock.
« Il ne promet jamais la lune. Il dit ce qu’il peut faire, et il le fait. Ça change des habitués du poste. »
Un député de la majorité, sous couvert d’anonymat
Les défis qui restent à relever
Mais soyons honnêtes : rien n’est gagné. Le budget de la Sécurité sociale arrive bientôt. Les oppositions sont déjà très remontées. Certains à droite parlent même de « hold-up fiscal ». À gauche, on attend des gestes forts sur les retraites ou la fiscalité des plus riches.
Et puis il y a la question de la durée. Combien de temps peut-on gouverner ainsi, au coup par coup, en négociant chaque virgule d’un texte ? Laurent Panifous le sait mieux que personne. Il l’a dit lui-même : il mesure parfaitement la fragilité de l’exercice.
Mais pour l’instant, il tient bon. Et dans cette période où tout semble pouvoir basculer à chaque vote, c’est déjà énorme. Peut-être même que, finalement, ce ministre discret venu d’un petit groupe indépendant est exactement l’homme qu’il fallait à cet endroit précis.
La politique, parfois, réserve ce genre de surprises. Un homme qu’on ne voyait pas venir devient soudain indispensable. Et Laurent Panifous, avec son calme et sa ténacité, incarne parfaitement cette idée. Affaire à suivre, évidemment. Mais pour l’instant, chapeau bas.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Un ministre discret peut-il vraiment faire la différence dans une période aussi chaotique ? Les commentaires sont ouverts, comme toujours.
