Vous est-il déjà arrivé de vous dire, en voyant un élu s’effondrer sous la pression, que finalement ces gens-là sont peut-être plus humains qu’on ne le croit ? Hier, en fin d’après-midi, c’est exactement ce qui s’est passé à Lyon.
Grégory Doucet, le maire écologiste qui dirige la troisième ville de France depuis 2020, participait à une réunion de travail comme il en enchaîne des dizaines chaque semaine. Et puis, soudain, le corps a dit stop. Malaise. Les pompiers appelés en urgence. Direction l’hôpital. On respire un grand coup quand on apprend que ça va, qu’il est conscient, que c’était « sans gravité ». Mais quand même… ça fait un choc.
Un après-midi qui bascule à l’Hôtel de Ville
Il était un peu plus de 17 heures. Dans une des grandes salles de la mairie, l’ambiance était studieuse, presque routinière. Des dossiers sur la table, des échanges sur les projets en cours, la vie normale d’une métropole qui ne dort jamais. Et puis, d’un seul coup, le maire pâlit, vacille. Les personnes autour de lui comprennent immédiatement que ce n’est pas une simple fatigue passagère.
Les secours arrivent très vite – à Lyon, l’Hôtel de Ville est à deux pas des casernes. Les sapeurs-pompiers prennent en charge l’édile de 52 ans avec le professionnalisme qu’on leur connaît. Direction l’hôpital de la Croix-Rousse, celui qui domine la ville depuis les pentes. Là-haut, les examens commencent. On parle d’un malaise vagal, peut-être lié au stress, à la fatigue accumulée, à un rythme infernal. Rien de dramatique, nous dit-on. Ouf.
« Il va bien. C’était un malaise sans gravité. »
Un proche de l’équipe municipale
Un rythme qui use même les plus solides
52 ans, ça reste jeune en politique. Mais quand on dirige une ville comme Lyon – 500 000 habitants intra-muros, plus de 1,3 million avec la métropole – le temps ne s’écoule pas de la même façon. J’ai souvent entendu des maires dire que chaque année à ce poste équivaut à trois ou quatre dans une vie « normale ». Grégory Doucet, lui, n’a jamais caché qu’il travaillait énormément. Depuis son élection surprise en 2020, il enchaîne les chantiers : la végétalisation, les pistes cyclables, la lutte contre la pollution, les menus sans viande à la cantine qui ont fait hurler une partie de la France… Tout ça en pleine crise Covid, puis avec l’inflation, les tensions sociales.
Ajoutez à cela la campagne qui se profile pour 2026. Les sondages, les alliances à construire, les attaques quotidiennes. On l’a vu ces derniers mois plus tendu, parfois agacé en conseil municipal. Le corps, lui, finit toujours par présenter la note.
- Des journées qui commencent à 7h et finissent après 22h
- Des week-ends souvent sacrifiés pour des inaugurations ou des réunions de crise
- Une exposition médiatique permanente, parfois violente
- Des menaces régulières – oui, certains élus écologistes reçoivent des courriers inquiétants
Et je ne parle même pas du sommeil. Combien d’heures par nuit quand on sait que le moindre tweet peut déclencher une tempête ?
Des réactions qui dépassent les clivages
Ce qui m’a marqué, c’est la vitesse à laquelle les messages de soutien sont tombés. Et pas seulement de son camp. L’un des premiers à réagir publiquement ? Jean-Michel Aulas. Oui, l’ancien patron de l’OL, probable futur adversaire aux municipales, celui avec qui les relations sont parfois électriques. Il a écrit simplement : « Prompt et complet rétablissement. » Sobre, classe. Humain.
Dans la foulée, d’autres figures politiques, de tous bords, ont suivi. On sent que quelque part, ils se reconnaissent dans cette fatigue-là. Parce que être maire d’une grande ville aujourd’hui, c’est un sport de combat quotidien. Et quand l’un d’eux tombe, même brièvement, ça rappelle à tout le monde la fragilité du poste.
« Derrière les étiquettes politiques, il y a des femmes et des hommes qui se donnent sans compter. Prenez soin de vous. »
Un élu d’opposition lyonnais
2026 déjà dans toutes les têtes
Évidemment, certains y ont vu tout de suite un signe. « S’il est déjà épuisé à mi-mandat… » murmurent les opposants dans les couloirs. D’autres, dans le camp écologiste, craignent que cet épisode soit instrumentalisé. La vérité, c’est que la campagne pour les municipales a déjà commencé en douce. Les listes se montent, les ambitions s’aiguisent. Et un maire en difficulté, même passagère, c’est toujours une fenêtre qui s’ouvre pour les autres.
Mais franchement, est-ce vraiment le moment ? L’homme est à l’hôpital, même si son état est rassurant. Laissons-lui le temps de se remettre avant de transformer son malaise en arme politique. Il y aura bien assez de temps pour les coups bas plus tard.
La santé des élus, un sujet qu’on évoque trop peu
Cet événement, mineur sur le plan médical, pose une question plus large : qui prend soin de ceux qui prennent soin de nos villes ? On parle beaucoup de burn-out dans le privé, mais rarement chez les élus. Pourtant, les chiffres existent. Des études montrent que plus d’un maire sur deux déclare avoir déjà connu des problèmes de santé liés au stress du mandat. Certains abandonnent en cours de route. D’autres tiennent, mais à quel prix ?
J’ai en tête le témoignage d’un ancien maire d’une grande ville qui m’avait confié, après son départ : « J’ai vieilli de dix ans en six. » Dix ans. En six. Ça fait réfléchir.
- Peu de vacances réellement déconnectées
- Une vie familiale souvent sacrifiée
- Une pression médiatique et judiciaire constante
- Des responsabilités énormes sur les épaules
Peut-être que l’épisode Grégory Doucet, justement parce qu’il se termine bien, permettra d’ouvrir le débat. Sans angélisme : oui, ils ont choisi ce métier. Mais non, ça n’autorise pas tout.
Et maintenant ?
À l’heure où j’écris ces lignes, le maire de Lyon est toujours sous observation. Des examens complémentaires sont prévus dans les prochains jours, histoire d’être sûr que tout va bien. Son agenda a été allégé, certaines obligations reportées. On parle d’un retour progressif en fin de semaine.
En attendant, la ville continue de tourner. Les adjoints assurent l’intérim, les dossiers avancent. Lyon ne s’arrête pas parce que son maire a eu un coup de fatigue. Mais quelque part, cette parenthèse dit beaucoup de notre époque : même les plus combatifs, même ceux qui portent les convictions les plus solides, restent des êtres humains.
Prenez soin de vous. Vraiment. Et si vous croisez un élu dans la rue, peut-être que lui dire simplement « bon courage » suffira. Parce que derrière les discours et les polémiques, il y a des gens qui donnent tout. Parfois trop.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Un malaise comme celui-ci change-t-il quelque chose à votre regard sur les élus ? Dites-le moi en commentaire, j’ai vraiment envie de savoir.
