Imaginez un instant : vous êtes au sommet de votre carrière, quadruple vainqueur du Dakar, maître de la navigation dans les dunes impitoyables. Puis, en une fraction de seconde, un accident bouleverse tout. C’est l’histoire de Mathieu Baumel, un homme dont la vie a basculé, mais dont la détermination reste intacte. À 49 ans, ce copilote d’exception, amputé de la jambe droite après un drame survenu en janvier, se bat pour remonter dans une voiture de rallye. Son objectif ? Être au départ du Dakar 2026. Mais au-delà de cet horizon, c’est une leçon de résilience qui se dessine.
Un Champion Face à l’Épreuve
Mathieu Baumel n’est pas un inconnu dans le monde du rallye-raid. Copilote de talent, il a marqué l’histoire du Dakar avec quatre victoires aux côtés de Nasser Al-Attiyah et un titre de double champion du monde. Son expertise dans la lecture des cartes et sa capacité à garder son sang-froid dans les conditions extrêmes du désert en ont fait une légende. Mais le 29 janvier dernier, tout a changé. Lors d’une intervention pour aider un équipage en panne au Rallye Monte-Carlo historique, un accident dramatique l’a laissé grièvement blessé.
En un éclair, ma vie a basculé. J’ai vu mes os, ma jambe en morceaux, et j’ai pensé : c’est fini.
– Mathieu Baumel, copilote
Ce soir-là, sur le périphérique de Reims, une voiture a percuté l’équipage qu’il assistait. Pris en sandwich entre deux véhicules, Baumel a immédiatement compris la gravité de la situation. Transporté d’urgence dans un hôpital spécialisé en traumatologie, il a subi une opération de huit heures, suivie d’un coma artificiel. Les médecins étaient clairs : sauver sa jambe droite nécessiterait des années de soins, sans garantie de récupération. Face à ce verdict, Baumel a pris une décision radicale.
Le Choix de l’Amputation : Une Porte vers l’Avenir
Pour beaucoup, perdre une jambe serait un coup fatal. Pas pour Baumel. Après avoir consulté ses proches, il a opté pour l’amputation. Ce choix, loin d’être une capitulation, était une stratégie. « Je voulais retrouver ma vie d’avant, ou du moins m’en rapprocher », explique-t-il. Cette décision, prise avec lucidité, montre la force mentale d’un homme habitué à naviguer dans les tempêtes, qu’elles soient de sable ou de vie.
Ce n’était pas une décision facile. Les premières semaines à l’hôpital ont été marquées par des moments de doute. Baumel se souvient d’un jour où, en feuilletant des photos de lui à vélo ou sur les pistes de ski, il a cru que ces joies lui seraient à jamais interdites. Mais un chirurgien, armé de photos de patients amputés reprenant des activités sportives, lui a redonné espoir. « J’ai compris que tout était possible, à condition de travailler dur », confie-t-il.
La Rééducation : Un Nouveau Défi à Conquérir
Depuis mars, Baumel a posé ses valises dans un centre spécialisé au Grau-du-Roi, sur les bords de la Méditerranée. Loin des dunes du désert, il affronte un autre type de terrain : celui de la rééducation. Équipé d’une prothèse depuis avril, il réapprend à marcher, un processus aussi exigeant que n’importe quelle étape du Dakar. « À 49 ans, reprogrammer son cerveau pour marcher, c’est comme réapprendre à naviguer dans un désert inconnu », plaisante-t-il.
Avec les sportifs de haut niveau, il faut souvent les freiner. Ils veulent aller trop vite, mais il faut être réaliste.
– Médecin spécialisé en rééducation
Chaque jour, Baumel suit un programme intensif : kinésithérapie, ergothérapie, activités physiques adaptées. Il côtoie d’autres patients, souvent plus âgés, avec qui il partage des moments de complicité autour de parties de pétanque ou de tir à l’arc. Ces activités, bien loin des cockpits surchauffés des voitures de rallye, l’aident à redévelopper son équilibre et sa confiance. Mais les progrès ne viennent pas sans peine. Les chutes, les douleurs dans sa jambe gauche encore fragile, et les jours où le moral flanche rappellent que le chemin est long.
- Kinésithérapie : Renforcement musculaire et apprentissage de la marche avec prothèse.
- Ergothérapie : Adaptation aux gestes du quotidien pour une autonomie retrouvée.
- Activités physiques : Pétanque, tir à l’arc, pour travailler l’équilibre et la coordination.
Pourtant, Baumel ne baisse pas les bras. Sa kinésithérapeute note sa progression rapide : « Il intègre les consignes à une vitesse impressionnante. On dirait qu’il lit une carte de rallye ! » Cette rigueur, héritée de ses années de copilote, est son arme secrète. Mais il sait aussi qu’il doit tempérer son impatience. « J’ai cru que je pourrais marcher en deux mois. La réalité m’a rattrapé », admet-il avec un sourire.
Le Rêve du Dakar 2026 : Un Défi Réaliste ?
Participer au Dakar 2026 est l’objectif qui fait vibrer Baumel. L’idée de devenir le premier copilote amputé à concourir dans cette course mythique est une source de motivation inépuisable. Mais est-ce réalisable ? Les experts sont prudents. « Le timing est serré, mais pas impossible », explique un médecin spécialisé. La clé réside dans l’adaptation de sa prothèse et de son environnement de course.
Baumel envisage déjà des solutions pratiques. Par exemple, une prothèse fixée à l’extérieur de la voiture pour les moments où il doit sortir rapidement, comme pour changer une roue dans le sable. « Je perdrai peut-être quelques secondes, mais mes compétences de navigateur compenseront largement », assure-t-il. Il a même prévu de tester une voiture de rallye directement dans l’enceinte du centre de rééducation. Cette détermination force l’admiration.
| Objectif | Défis | Solutions envisagées |
| Participer au Dakar 2026 | Maîtrise de la prothèse, douleurs jambe gauche | Prothèse adaptée, tests en conditions réelles |
| Autonomie quotidienne | Équilibre, coordination | Entraînement intensif, activités adaptées |
| Retour à la compétition | Adaptation du cockpit | Modifications techniques, simulateur de conduite |
En parallèle, Baumel explore d’autres options. Il s’entraîne sur un simulateur de conduite adapté, avec des pédales inversées pour n’utiliser que sa jambe gauche. Cette flexibilité montre qu’il ne met pas tous ses œufs dans le même panier. « Si le Dakar est hors de portée, je pourrais courir sur circuit ou viser d’autres défis », explique-t-il.
Au-Delà du Rallye : Les Jeux Olympiques en Ligne de Mire
Ce qui rend l’histoire de Baumel si captivante, c’est sa capacité à transformer une tragédie en opportunité. Loin de se limiter au rallye, il rêve grand. Inspiré par des athlètes handisport comme Pauline Déroulède, il envisage de se lancer dans des disciplines comme le cyclisme, l’aviron ou le tir à l’arc. « Participer aux Jeux Paralympiques, ce serait incroyable », lance-t-il, les yeux brillants.
Ma vie sera différente, mais elle n’est pas foutue. J’ai survécu à deux arrêts cardiaques. Le destin m’a donné une seconde chance.
– Mathieu Baumel
Ce rêve n’est pas farfelu. En handisport, l’âge est moins un frein, et Baumel a déjà prouvé qu’il avait le mental d’un champion. Son entourage, de sa famille à ses médecins, croit en lui. « Il a une force intérieure rare », confie un proche. Mais pour l’instant, l’objectif est plus terre-à-terre : quitter le centre de rééducation début juillet, passer du temps chez lui, puis continuer son entraînement dans un autre établissement spécialisé.
Une Leçon de Résilience pour Tous
Ce qui frappe chez Mathieu Baumel, c’est sa capacité à regarder vers l’avenir, même dans les moments les plus sombres. Après avoir frôlé la mort – deux arrêts cardiaques et une perte de sang massive –, il savoure chaque petite victoire. Monter un escalier, faire quelques pas sans béquilles, ou simplement envisager un retour dans le désert : chaque étape est une conquête. « J’aimerais fouler à nouveau le sable, sentir cette liberté », confie-t-il.
- Accepter le changement : Baumel a transformé un drame en opportunité.
- Fixer des objectifs : Le Dakar 2026 et les Jeux Paralympiques comme moteurs.
- Entourage solide : Sa famille et ses médecins jouent un rôle clé dans sa récupération.
J’ai toujours admiré les athlètes qui, face à l’adversité, trouvent le moyen de se réinventer. Baumel incarne cette idée. Il ne se contente pas de survivre ; il veut vivre pleinement, que ce soit dans un cockpit, sur un vélo, ou sur un podium paralympique. Son histoire nous rappelle que les limites ne sont souvent que des barrières mentales.
Et Après ? Un Horizon Plein de Possibilités
À l’heure où j’écris ces lignes, Baumel continue son combat quotidien. Chaque pas, chaque exercice est une étape vers son retour. Mais au-delà du sport, il veut aussi inspirer. « Je ne veux pas être un poids pour ma famille. Je veux leur montrer que tout est possible », dit-il. Cette volonté d’autonomie, couplée à une ambition débordante, fait de lui un modèle.
Et si le Dakar 2026 reste un objectif ambitieux, Baumel a déjà prouvé qu’il pouvait déplacer des montagnes – ou plutôt des dunes. Que ce soit en tant que copilote, pilote, ou athlète paralympique, son avenir s’annonce riche en défis. Comme il le dit lui-même : « Le destin m’a mis face à une nouvelle difficulté, mais je suis en vie. » Et cette vie, il compte bien la vivre à fond.
L’histoire de Mathieu Baumel n’est pas seulement celle d’un champion du Dakar. C’est celle d’un homme qui refuse de laisser un accident définir son avenir. En le suivant, on comprend que la résilience n’est pas qu’un mot à la mode : c’est une force qui peut transformer une tragédie en un nouveau départ. Alors, sera-t-il au départ du Dakar 2026 ? Une chose est sûre : il ne lâchera rien pour y arriver.
