Imaginez-vous un matin de janvier, le froid qui pince dehors, et cette odeur irrésistible de beurre fondu et d’amandes grillées qui vous attire comme un aimant vers la petite boulangerie du coin. Vous poussez la porte, la clochette retentit, et là… vous savez déjà que vous allez craquer. Cette année, en France, une galette en particulier fait parler d’elle bien au-delà de son village : elle a été sacrée la meilleure du pays. Et elle vient d’un coin qu’on n’attendait pas forcément sur la plus haute marche.
Non, pas de palace parisien, pas de chef médiatique. Juste un artisan de 57 ans, Gilles, qui pétrit depuis quarante ans dans sa boutique de Courville-sur-Eure. Un homme qui parle doucement, qui rit de ses propres blagues et qui, début décembre, a fait taire vingt concurrents venus de toute la France. Le concours national de la meilleure galette aux amandes ? Remporté haut la main. Ou plutôt, haut la pâte.
Quand le goût bat l’esthétique pure
Ce qui rend cette victoire tellement savoureuse, c’est qu’elle n’était pas écrite d’avance. Lors des épreuves régionales, notre artisan avait déjà senti le vent tourner : sa galette était bonne, très bonne même, mais visuellement, certains concurrents jouaient dans une autre catégorie. Rayures parfaites, dorure miroir, motifs presque trop beaux pour être mangés.
Alors il a retravaillé sa pâte, affiné les finitions, passé des nuits à tester. Pas pour faire « plus beau », mais pour que le visuel soit enfin à la hauteur du goût qu’il maîtrise depuis toujours. Résultat ? Au national, face à des fours inconnus, dans un stress énorme et avec seulement quelques heures pour tout réaliser, il présente deux galettes de 30 cm… et le jury craque. Pas forcément la plus photogénique, mais celle qu’on n’arrive pas à lâcher une fois qu’on y a planté la fourchette.
« Tout s’est joué sur le goût. Franchement, la mienne n’était pas la plus belle. Et pourtant… »
Le vainqueur, avec le sourire modeste de ceux qui savent
Les critères qui font un champion
Pour ceux qui n’ont jamais assisté à ce genre de concours (et croyez-moi, c’est aussi sérieux qu’un Bocuse d’Or version pâte feuilletée), voilà ce que les jurys scrutent à la loupe :
- L’hygiène impeccable (évidemment)
- La régularité de la cuisson
- La finesse du rayage sur le dessus
- L’équilibre parfait pâte / crème
- La texture fondante de la crème d’amandes
- La brillance de la dorure
- Et surtout, surtout… le goût en bouche
Et là, petit détail qui tue : entre les trois finalistes, quelques dixièmes de point seulement. À ce niveau, tout le monde sait faire une excellente galette. C’est la petite touche personnelle, l’émotion presque, qui fait basculer le classement.
Le secret ? Du beurre, du vrai, et rien d’autre
On a tous entendu les discours marketing sur les ingrédients « premium ». Lui, il le dit simplement : « Prenez du bon beurre, beaucoup de bon beurre, et arrêtez de mettre des trucs inutiles dedans. » Point final. Pas de sirop de glucose, pas d’arômes artificiels, pas de poudre d’amande bas de gamme. Juste de la qualité brute. Et ça change tout.
D’ailleurs, petite confidence : quand il a commencé à concourir au niveau départemental il y a plus de dix ans, il a terminé deuxième. Ça aurait pu le décourager. Au lieu de ça, il s’est dit : « Deuxième, ça veut dire que je peux être premier. » Depuis, neuf titres départementaux, des régionaux, et maintenant le Graal national. La persévérance, ça paye. Surtout quand on travaille comme un dingue.
L’effet concours : la boutique prise d’assaut
Depuis l’annonce, c’est la folie douce à Courville-sur-Eure. Les habitués félicitent, les curieux débarquent, le téléphone sonne non-stop. L’artisan a même dû embaucher une personne supplémentaire rien que pour gérer l’affluence attendue en janvier.
Et là, décision radicale : pour la saison 2026, il ne proposera que la galette primée. Exit les versions pistache, praliné ou trois chocolats. On se concentre sur la reine absolue. L’an dernier, 1 500 galettes étaient sorties du four. Cette année ? On table sur 30 % de ventes en plus minimum, et peut-être jusqu’à début février pour satisfaire tout le monde.
« Les premières galettes primées sortiront le 1er janvier. Après, on verra jusqu’où ça ira, mais je ne veux décevoir personne. »
Pourquoi cette victoire nous touche autant
Franchement, au-delà du plaisir gourmand, il y a quelque chose de profondément réconfortant dans cette histoire. Dans un monde où tout va vite, où les grandes chaînes écrasent souvent les petits, voir un artisan de campagne, qui bosse depuis l’aube, remporter le titre national face à des pointures… ça fait du bien.
C’est la preuve que le savoir-faire, la patience et l’amour du produit finissent toujours par payer. Et puis, soyons honnêtes : janvier, c’est gris, c’est froid, c’est la reprise. Alors si une part de galette aux amandes peut nous faire sourire bêtement, pourquoi s’en priver ?
Personnellement, j’ai déjà noté l’adresse. Début janvier, je prends la route direction l’Eure-et-Loir. Parce que oui, parfois, les meilleures choses de la vie ne se trouvent pas sous les néons d’une grande capitale, mais au coin d’une petite place de village, derrière une vitrine embuée qui sent le beurre et la victoire.
Et vous, vous laisserez-vous tenter par la meilleure galette aux amandes de France cette année ? Je parie que oui.
Petit bonus pour les vrais amateurs : si vous passez par là avant l’Épiphanie, demandez la « fleurysette » en plus de la galette. Apparemment, c’est la petite spécialité maison qui accompagne à merveille une part de bonheur doré.
