Vous est-il déjà arrivé de vous demander jusqu’où un parent peut aller pour « éduquer » son enfant ? Moi, oui. Et puis j’ai lu cette histoire. Une gamine de 12 ans, obligée de s’agenouiller sur le palier, en pleurs, pendant que sa propre mère lui rasait la tête à blanc. Pas dans l’intimité de la salle de bains. Non. Devant la porte ouverte, à la vue des voisins. Juste parce qu’elle avait griffé le canapé avec ses ongles. Franchement, ça vous retourne l’estomac, non ?
Une punition qui franchit toutes les lignes rouges
Les faits se sont déroulés un soir d’avril, dans un immeuble tranquille du 12e arrondissement parisien. La mère, 50 ans, auto-entrepreneuse dans l’événementiel, découvre une griffure sur la housse toute neuve de son canapé. Réaction immédiate : elle explose. Dix minutes plus tard, sa fille cadette se retrouve à genoux contre le mur, puis déplacée sur le palier commun. Et là, sous les yeux de qui voudra bien passer, la tondeuse s’allume.
Les voisins ont entendu les pleurs. Certains ont même vu la scène. Personne n’a osé intervenir sur le moment – vous savez ce que c’est, « c’est une affaire de famille »… Mais le lendemain, un signalement a été fait. Et l’affaire a atterri devant le tribunal correctionnel.
« Une scène particulièrement humiliante, à la vue de tous, pour une enfant dont la personnalité est encore en construction. »
Maître Roman Leibovici, avocat de l’enfant
Quatre mois de prison avec sursis probatoire
Mercredi soir, le verdict est tombé : quatre mois de prison avec sursis probatoire pendant deux ans, obligation de soins psychologiques, stage de responsabilité parentale et interdiction de contact avec la fille sans autorisation judiciaire. La procureure avait requis six mois. La défense plaidait la « perte de contrôle ponctuelle ». Le tribunal a tranché au milieu.
Ce n’est pas une peine anodine. Le sursis probatoire, c’est du sérieux : au moindre écart pendant deux ans, la prison ferme peut tomber. Et surtout, la justice a clairement posé que raser la tête de son enfant en public, c’est de la violence, point barre.
Pourquoi la tonte reste un acte symboliquement si violent
Dans l’imaginaire collectif, tondre quelqu’un, c’est l’humilier au plus profond. On pense aux femmes tondues à la Libération, accusées de collaboration. On pense aussi aux camps, aux prisons, aux rites de soumission. Rasée, une personne perd une partie de son identité, surtout une adolescente pour qui les cheveux sont souvent un moyen d’expression énorme.
À 12 ans, on est en plein d’angoisses sur son apparence. Aller au collège le lendemain avec le crâne à nu, c’est offrir aux autres un terrain de moquerie infini. C’est graver la honte dans la chair – ou plutôt, dans l’absence de cheveux.
- Perte immédiate d’estime de soi
- Exposition publique de la « faute »
- Marque visible pendant des mois
- Souvenir traumatique durable
Les psys sont unanimes : ce type de punition laisse des traces bien plus profondes que la douleur physique.
L’écho glaçant avec l’affaire du foyer du 13e
Le plus fou ? Cette condamnation arrive deux jours seulement après la révélation d’une autre affaire : des éducateurs d’un foyer parisien filmés en train de tondre un garçon de 8 ans, soi-disant pour le punir d’avoir coupé les cheveux d’un autre enfant. La vidéo a fait le tour des réseaux. Enquête ouverte, suspension des salariés, tollé général.
Deux affaires en une semaine, dans la même ville, avec la même méthode. On se demande si certains adultes n’ont pas gardé en tête des pratiques d’un autre temps.
La loi a évolué, les mentalités peinent à suivre
Depuis 2019, la France interdit formellement les « violences éducatives ordinaires » (loi contre la fessée et autres humiliations). Avant, on parlait encore de « droit de correction. Aujourd’hui, non. L’article 371-1 du Code civil est clair : l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ni psychologiques.
Malgré tout, dans certaines familles, l’idée persiste que « faire honte » reste une méthode éducative valable. « Ça lui apprendra », « Moi on m’a fait pire et je m’en suis sorti »… Les phrases qu’on entend encore trop souvent dans les cours d’immeuble.
Ce genre de condamnation, c’est aussi un message : non, ce n’est plus toléré. Jamais.
Et l’enfant dans tout ça ?
La gamine a été placée provisoirement chez une tante. Elle est suivie par une psychologue. À l’audience, elle n’a pas souhaité s’exprimer directement, mais son avocat a lu un texte déchirant où elle explique qu’elle « ne veut plus jamais revenir vivre avec sa mère tant qu’elle n’aura pas compris ».
À 12 ans, on comprend déjà très bien quand on a été trahi par la personne censée nous protéger avant tout.
Que faire quand on est témoin d’une telle scène ?
C’est la question qui revient sans cesse dans les commentaires sous les articles. Appeler la police ? Parler aux parents ? Filmer ?
- Le 119 (Allô Enfance en Danger) – anonyme, 24h/24
- Le 17 si danger immédiat
- Un signalement écrit à la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP) du département
- Parler à l’enfant en privé pour lui dire qu’on est là si besoin
On a tous peur de « briser une famille ». Mais parfois, ne rien faire, c’est laisser un enfant seul face à l’inacceptable.
Vers une parentalité sans violence : utopie ou réalité proche ?
Il existe aujourd’hui des stages de responsabilité parentale (obligatoires dans ce genre de dossier). On y parle gestion de la colère, communication non-violente, besoins de l’enfant selon son âge. Certains parents en sortent transformés. D’autres… moins.
Moi je crois que tant qu’on continuera à présenter l’éducation comme une guerre où il faut « dompter » l’enfant, on aura ce genre d’histoires. Un canapé griffé, ça se nettoie ou ça se change. Une enfance abîmée, c’est nettement plus compliqué.
Cette affaire, aussi dure soit-elle à lire, a au moins le mérite de rappeler une chose essentielle : un parent n’a pas tous les droits. Jamais. Et quand il les dépasse, la société doit protéger l’enfant. Point.
Et vous, où placez-vous la limite ? Racontez-moi en commentaire si vous avez déjà été témoin de punitions qui vous ont choqué. Peut-être que, ensemble, on arrivera à faire bouger les lignes, une conversation à la fois.
