Il y a des affaires qui vous collent à la peau. Des histoires où la violence semble presque irréelle, jusqu’à ce que les faits vous rattrapent brutalement. Quand on pense que le pire est derrière, une nouvelle page s’ouvre, plus sombre encore. C’est exactement ce qui se passe en ce moment à Paris avec cet homme de 28 ans qu’on appelle désormais, dans les couloirs de la PJ, simplement « Moïse ».
Je ne vais pas vous faire languir : ce mardi matin, il a été sorti de sa cellule de la prison de la Santé pour être placé en garde à vue. Pas pour l’affaire qui l’a déjà conduit derrière les barreaux – le meurtre sauvage d’une femme de 38 ans en juillet 2024 – mais pour trois autres dossiers. Trois femmes, trois agressions d’une violence inouïe, toutes liées à des rencontres tarifées. Et franchement, quand on regarde le tableau complet, ça fait froid dans le dos.
Une escalade qui donne le vertige
Reprenons depuis le début, calmement, parce qu’il y a de quoi perdre le fil dans cette histoire.
L’été dernier, Paris a connu une série noire particulièrement glaçante pour les travailleuses du sexe. Des femmes retrouvées mortes dans leur appartement, des scènes de crime d’une brutalité rare. Au milieu de tout ça, un homicide dans le XVe arrondissement a marqué les esprits : une femme chinoise de 38 ans, tuée à coups d’haltères. L’appartement sens dessus dessous, du sang partout, une violence qui dépassait l’entendement.
Quatre jours plus tard, les enquêteurs mettaient la main sur le suspect. Un colosse de près de deux mètres, arrêté à Gennevilliers. Devant les policiers, il n’a pas vraiment nié les faits, mais il a minimisé : « Je voulais juste la mettre KO, pas la tuer. » Une phrase qui résonne encore aujourd’hui, surtout quand on sait ce qui vient de ressortir.
Trois nouvelles victimes dans le viseur
Ce qu’on apprend maintenant, c’est que le parcours de cet homme ne se limite pas à ce seul drame. Les enquêteurs de la brigade criminelle ont exhumé trois autres dossiers, tous antérieurs au meurtre de juillet. Trois femmes – deux Sud-Américaines, une Chinoise – qui auraient croisé sa route dans des circonstances similaires.
Les qualifications retenues parlent d’elles-mêmes : violences aggravées et tentative de meurtre. L’une des victimes s’est vue prescrire 80 jours d’ITT. Quatre-vingts jours. Laissez ça vous traverser l’esprit deux secondes. Ce n’est pas une simple gifle ou une altercation qui tourne mal. On parle de sévices graves, organisés, dans un contexte de rapport tarifé.
Il y a des moments où on se demande comment certains individus passent si longtemps sous les radars.
Et c’est là que ça devient troublant. Parce que si ces trois agressions sont confirmées, on n’est plus face à un coup de folie isolé, mais face à un schéma. Une montée en puissance, presque méthodique. Des violences qui s’aggravent au fil des mois, jusqu’à l’irréparable.
Un profil qui intrigue les enquêteurs
Qui est vraiment cet homme ? Difficile d’en dire trop sans tomber dans les clichés, mais quelques éléments reviennent constamment dans les échanges avec ceux qui suivent l’affaire de près.
- Un gabarit impressionnant – près de 2 mètres, costaud – qui donne immédiatement l’avantage physique.
- Une capacité apparente à compartimenter : il conteste l’intention homicide tout en reconnaissant vouloir « sonner » ses victimes.
- Une absence totale d’explication claire sur ses motivations profondes.
Devant la juge, il avait parlé de vouloir « la mettre KO le temps de partir ». Une justification qui laisse perplexe. On ne neutralise pas quelqu’un avec des haltères pour « partir tranquillement ». Il y a quelque chose de plus profond, de plus sombre, qui échappe encore.
Et c’est peut-être ça le plus inquiétant : on a l’impression qu’on gratte seulement la surface.
Paris, été 2024 : une période noire
Pour bien comprendre l’ampleur du phénomène, il faut se replonger dans le contexte de cet été-là. En quelques semaines seulement :
- 6 juillet : découverte du corps dans le XVe
- 9 juillet : une femme transgenre péruvienne poignardée dans le XVIe
- 9 août : une travailleuse du sexe chinoise tuée dans le XIIIe
- 12 août : une autre femme chinoise assassinée dans le XIe
Quatre femmes en un mois et demi. Quatre vies brisées. Et dans ce chaos, l’affaire Moïse apparaît aujourd’hui sous un jour nouveau. Était-il lié à d’autres drames ? Les enquêteurs creusent, comparent, croisent les éléments. Pour l’instant, rien ne permet de l’affirmer. Mais la question est posée.
La vulnérabilité des travailleuses du sexe
Derrière les faits divers, il y a une réalité qu’on a trop souvent tendance à oublier. Ces femmes travaillent dans l’ombre, souvent seules, dans des appartements exigus. Elles ouvrent leur porte à des inconnus, par nécessité économique. Le danger fait partie du décor.
Quand une agression survient, elle reste parfois dans l’ombre. Par peur des représailles, par honte, par méfiance envers la police. Combien de victimes n’ont jamais porté plainte ? Combien de Moïse en puissance continuent de circuler librement parce que personne n’a osé parler ?
J’ai discuté avec des associatifs qui accompagnent ces femmes au quotidien. Leur constat est unanime : la violence est en hausse constante depuis plusieurs années. Et les profils des agresseurs se diversifient. On n’est plus seulement dans le client violent occasionnel, mais parfois dans des passages à l’acte réfléchis, presque ritualisés.
Et maintenant ?
La garde à vue en cours peut durer jusqu’à 96 heures dans ce type d’affaires. Ensuite, soit de nouvelles mises en examen, soit un retour en détention en attendant la suite. Une reconstitution est déjà prévue dans le dossier initial. Elle aura lieu ce mois-ci.
Mais au-delà du parcours judiciaire, c’est toute une réflexion qui s’impose. Sur la protection de ces femmes. Sur les failles du système. Sur cette zone grise où la sexualité tarifée rencontre parfois le pire de l’humain.
Une chose est sûre : cette affaire n’a pas fini de livrer ses secrets. Et quand on voit l’évolution du profil de cet homme – des violences graves à la tentative de meurtre, puis au meurtre accompli – on ne peut s’empêcher de se demander : combien d’autres victimes potentielles a-t-il croisées avant que la machine ne s’arrête enfin ?
Je vous tiens au courant dès qu’il y a du nouveau. Parce que des histoires comme celle-ci, on préfère les voir se terminer devant un tribunal plutôt que dans un nouveau fait divers.
(Article mis à jour le 2 décembre 2025 – sources policières et judiciaires)
