Il y a des soirs où le football ressemble à une pièce de théâtre un peu bancale, mais qui finit quand même par arracher les trois points. Hier soir, au Stade Louis-II, Monaco a vécu exactement ça face à Galatasaray : une victoire 1-0, pas vraiment sexy, mais sacrément précieuse. Et quand on joue la survie en Ligue des champions, on ne va pas faire la fine bouche.
Franchement, j’ai rarement vu un match aussi bizarre. D’un côté des Monégasques qui dominaient territorialement, de l’autre des Turcs venus en masse – le Louis-II sonnait plus jaune et rouge que rouge et blanc – et pourtant capables de faire douter tout le monde pendant soixante-dix minutes. Le genre de soirée où tu sens que ça peut basculer sur un rien… et c’est exactement ce qui s’est passé.
Une victoire qui répond aux Ultras… sur le terrain
Retour en arrière rapide. Il y a quelques jours, les Ultras Monaco 1994 balançaient un communiqué incendiaire. Pas le genre de petite lettre polie : non, un vrai pavé dans la mare, reprochant aux joueurs le manque de caractère et à la direction une certaine mollesse. Quand tu lis ça en tant que supporter, tu te dis que le prochain match à domicile va être tendu. Eh bien les joueurs ont répondu de la plus belle des manières : en gagnant. Point.
Ce n’est pas une démonstration, loin de là. Mais parfois, une victoire moche vaut mieux que dix matchs plaisants soldés par des nuls. Sébastien Pocognoli, l’intérimaire qui commence à prendre ses marques, doit sûrement dormir un peu mieux ce matin.
Le tournant : l’expulsion du gardien et l’entrée frigorifiée de Güvenc
On joue la 65e minute environ. Ugurcan Çakir, le portier titulaire de Galatasaray, reste au sol après un contact. Rien de méchant apparemment, mais il ne peut pas continuer. Günay Güvenc entre… à froid. Littéralement. Il n’a pas touché un ballon, pas eu le temps de s’échauffer correctement.
Trois minutes plus tard, corner monégasque. Thilo Kehrer, impérial dans les airs, place une tête lobée. Güvenc se troue complètement sur sa sortie, Balogun n’a plus qu’à pousser le ballon de la cuisse. 1-0. Le Louis-II explose (enfin, la partie rouge et blanche). Parfois, le football tient à ça : une erreur, un replacement foireux, et tout bascule.
« On a eu un peu de réussite sur le but, mais on a aussi mis les ingrédients qu’il fallait avant. »
– Un proche du vestiaire monégasque, après le match
Folarin Balogun, l’homme qui porte Monaco en Europe
Parlons-en de l’Américain. On l’a parfois critiqué – moi le premier – pour son manque de réalisme en Ligue 1. Mais en Ligue des champions ? Le garçon se transforme. Trois matchs, trois buts. Hier soir, il a vendangé quelques occasions franches avant de finalement trouver la faille. Un vrai renard des surfaces quand les projecteurs européens s’allument.
Et pourtant, il aurait pu être le héros… ou le zéro du match un peu plus tôt. Pénalty en début de seconde période. Denis Zakaria, capitaine courage, prend ses responsabilités. Mais sa frappe est molle, presque timide, et le gardien repousse. Tu sens alors le stade retenir son souffle. Heureusement, la délivrance viendra plus tard.
- Tirs cadrés de Monaco : seulement 4 sur toute la partie
- Occasions nettes vendangées avant le but : au moins 5
- Buts inscrits en C1 cette saison par Balogun : 3 (co-meilleur buteur du club dans la compétition)
18e place : le Graal des barrages à portée de main
Avec ces trois points, Monaco bondit à la 18e place du grand classement de la phase de ligue. Pour ceux qui n’ont pas encore tout compris au nouveau format : les 8 premiers vont directement en huitièmes, les places 9 à 24 disputent des barrages aller-retour. Être 18e, c’est donc être dans le bon wagon… pour l’instant.
Mais attention, rien n’est joué. Il reste deux matchs et le calendrier est infernal :
- Déplacement au Santiago Bernabéu face au Real Madrid (déjà qualifié, mais qui voudra finir fort)
- Réception de la Juventus à domicile en janvier
Prendre quatre points sur six serait idéal. Trois serait déjà pas mal. Zéro… et là, ça redeviendrait très chaud. On a vu des équipes craquer dans les dernières journées, on a aussi vu des remontées folles. Monaco est sur la corde raide, mais toujours vivant.
Pocognoli, l’intérimaire qui commence à faire son trou
Depuis qu’il a pris l’équipe en mains, l’ancien adjoint fait du Pocognoli. Pas de révolution tactique, mais une solidité retrouvée et surtout une mentalité différente. Hier, même quand ça ne voulait pas sourire, les joueurs n’ont jamais lâché. C’est déjà énorme par rapport à certaines prestations précédentes.
Est-ce qu’il restera après janvier ? La question commence à se poser sérieusement. Parce que pour l’instant, les résultats parlent pour lui. Et dans le football moderne, ça pèse lourd.
Et maintenant ? Le money time européen
On va être honnête : personne n’imaginait Monaco jouer les barrages en début de saison. On parlait plutôt de lutte pour la 36e place et d’élimination précoce. Et pourtant, les voilà à deux matchs de potentiellement prolonger l’aventure jusqu’en mars.
Le déplacement à Madrid va être un révélateur. Si les Monégasques ramènent ne serait-ce qu’un point du Bernabéu, là on pourra vraiment commencer à y croire. Et puis recevoir la Juve ensuite, avec un Louis-II qui sera – espérons-le – redevenu rouge et blanc à 100 %, ça peut faire très mal.
Le football, parfois, réserve des scénarios dingues. Monaco est en train d’en écrire un. Pas le plus beau, pas le plus flamboyant, mais un scénario qui pourrait déboucher sur quelque chose de grand. Ou sur une énorme déception. C’est tout l’intérêt de cette nouvelle Ligue des champions : tout reste ouvert jusqu’au bout.
En attendant, les joueurs peuvent rentrer chez eux avec le sentiment du devoir accompli. Les Ultras ont eu leur réponse sur le terrain. Et nous, supporters, on peut encore rêver un peu. Parce que tant qu’il y a de la 18e place, il y a de l’espoir.
Prochain rendez-vous : Real Madrid – Monaco. Ça sent la poudre, ça sent l’Europe, ça sent la vie. Et franchement, on ne s’en lasse pas.
