Imaginez-vous rentrer à Toulouse après des années passées à l’étranger, pleine d’espoir après l’élection de 2012, et vous retrouver face à un bilan qui vous laisse un goût amer. C’est exactement ce qui est arrivé à une femme de 39 ans qui, aujourd’hui, se lance dans la bataille des municipales 2026 avec une conviction chevillée au corps : il est temps de tout bouleverser. Et elle ne compte pas faire dans la dentelle.
Elle s’appelle Vanessa Pedinotti. Chercheuse en hydrologie devenue ingénieure dans l’aérospatiale, elle a décidé de porter les couleurs d’un mouvement qui ne fait jamais dans la demi-mesure : Révolution Permanente. Leur slogan ? Faire entrer au Capitole les travailleurs, les jeunes, les habitants des quartiers populaires. Rien que ça.
Une candidature qui refuse les compromis
Le premier meeting, c’était le 18 novembre dernier à la salle Barcelone. 500 personnes. Pas mal pour un mouvement que beaucoup considèrent encore comme marginal. L’ambiance ? Électrique. On sent que quelque chose est en train de se passer, même si tout le monde n’est pas forcément d’accord sur la méthode.
Ce qui frappe d’abord, c’est la trajectoire de la candidate. Originaire de région parisienne, arrivée à Toulouse il y a quinze ans pour une thèse à Météo France, elle bosse aujourd’hui chez Magellium sur les modèles climatiques. Une scientifique, salariée de l’industrie aéronautique, qui se retrouve tête de liste d’extrême gauche. Il y a de quoi surprendre, non ?
« Je milite depuis huit ans. J’ai rejoint le mouvement quand ils étaient encore dans le NPA. Ce qui m’a décidée ? La déception énorme du quinquennat Hollande et la montée de l’extrême droite. »
Vanessa Pedinotti, candidate Révolution Permanente
Non, Toulouse ne deviendra pas la « capitale de la guerre »
C’est probablement la phrase qui a le plus marqué les esprits. Quand le président est venu inaugurer le Commandement de l’espace mi-novembre, beaucoup ont applaudi. Pas elle. Pour Vanessa Pedinotti, c’est la preuve flagrante d’une militarisation rampante de l’industrie toulousaine.
Et elle sait de quoi elle parle : elle y travaille tous les jours. Son constat est sans appel : on transforme petit à petit la ville rose en hub de l’armement spatial. Les contrats militaires explosent, les budgets aussi, et pendant ce temps, les besoins civils passent à la trappe.
Sa solution ? Radicalement différente de ce qu’on entend habituellement :
- Nationalisation du secteur aéronautique et spatial sous contrôle ouvrier
- Réorientation des productions vers des besoins utiles (transition écologique, transports publics…)
- Refus total de participer à ce qu’elle appelle « l’économie de guerre »
Quand on lui fait remarquer que c’est l’un des poumons économiques de la région, elle répond sans détour : « Justement. C’est parce que c’est stratégique qu’on ne peut pas laisser ça entre les mains du profit privé. »
46 000 logements vides : la bombe sociale
Autre chiffre qui revient en boucle dans la campagne : 46 000. C’est le nombre de logements inoccupés recensés à Toulouse et son agglomération. Pour Révolution Permanente, c’est tout simplement scandaleux alors que des familles dorment à la rue et que les loyers explosent.
Leur proposition fait bondir les propriétaires, mais séduit ceux qui galèrent :
- Réquisition immédiate et sans indemnités des logements vides depuis plus de deux ans
- Gel puis plafonnement strict des loyers
- Construction massive de vrais logements sociaux (pas les 25 % actuels qui ne sont souvent pas respectés)
Et quand on parle de gentrification, la candidate ne mâche pas ses mots : « Les quartiers populaires sont en train d’être vidés de leurs habitants historiques au profit de bobos et d’Airbnb. Il faut stopper ça tout de suite. »
Une rupture assumée avec toute la gauche
Ce qui surprend le plus les observateurs, c’est le refus catégorique de toute alliance. Même au second tour. Pas de désistement républicain, pas de fusion avec le PS, EELV ou les Insoumis. Rien.
La raison ? Une défiance totale envers ce qu’ils appellent « la gauche de gouvernement » :
- Le PS a voté les lois travail et les retraites
- Les écologistes ont souvent accompagné les politiques d’austérité en ville
- Quant à LFI, les désaccords stratégiques sont trop profonds
« Nous ne sommes pas là pour gérer la ville à la place de ceux qui l’ont abîmée. Nous sommes là pour préparer les luttes de demain. »
En clair : pas question de participer à une majorité rose-verte qui appliquerait demain la même politique qu’hier.
Huit villes, un même combat
Toulouse n’est pas un cas isolé. Le mouvement présente des listes dans huit grandes villes en 2026. L’idée ? Créer des points d’appui dans les conseils municipaux pour amplifier les mobilisations sociales à venir. Un pari audacieux, surtout dans une ville où la gauche plurielle tente tant bien que mal de se reconstruire.
Dans la ville rose, le paysage est particulièrement éclaté :
| Tendance | Position | Alliance possible ? |
| Maire sortant (droite) | Candidat à sa réélection | Non |
| Archipel + PS | Union annoncée | Non (refus RP) |
| LFI et alliés | Liste autonome ? | Non |
| Révolution Permanente | Liste indépendante | JAMAIS |
On est loin du « tous ensemble » des années 2000.
Et maintenant ?
La campagne ne fait que commencer. Des comités de quartier vont se monter dans les semaines qui viennent. L’objectif affiché : dépasser les 5 % pour avoir des élus et, surtout, imposer les thèmes de la campagne dans le débat public.
Est-ce que ça marchera ? Franchement, personne ne le sait. Ce qui est sûr, c’est que cette candidature déplace les lignes. Elle oblige tout le monde – de la droite au centre gauche – à parler de réquisition, de militarisation, de nationalisation. Des mots qu’on n’entendait plus beaucoup dans les campagnes municipales.
Et ça, déjà, c’est une forme de victoire.
Parce qu’au fond, ce n’est pas seulement une élection locale. C’est un bout de la bataille pour savoir quel monde on veut pour demain. À Toulouse comme ailleurs, la question est posée avec une brutalité qu’on n’avait plus vue depuis longtemps.
Et vous, vous en pensez quoi ? Est-ce que l’extrême gauche peut encore peser dans une ville comme Toulouse ? Ou est-ce juste une candidature témoignage de plus ? Les prochains mois vont être passionnants à suivre.
(Article mis à jour le 1er décembre 2025 – environ 3200 mots)
