Imaginez-vous pousser les portes d’une salle mythique un soir de décembre, l’air frais de Paris encore sur les épaules, et vous retrouver plongé dans un univers sonore complètement décalé. C’est exactement ce que j’ai vécu mardi soir à la Salle Pleyel. La foule était jeune, excitée, et l’ambiance électrique avant même que les lumières ne s’éteignent. Oklou, cette artiste qui a explosé cette année, concluait là sa grande tournée. Et franchement, je ne savais pas trop à quoi m’attendre.
Je me souviens encore de son passage précédent à Paris, au printemps. Le show était prometteur, mais un peu brut de décoffrage, comme si tout n’était pas encore tout à fait au point. Trente dates plus tard, avec un album acclamé et une programmation à un festival américain prestigieux dans la poche, on sentait que quelque chose avait changé. Elle arrivait avec une vraie maturité scénique. Ou du moins, c’est ce que j’espérais.
Une soirée qui a alterné le sublime et le déconcertant
Le rideau tombe, les lumières baissent, et Oklou apparaît. Coiffée d’une perruque scintillante qui capte tous les spots, elle attaque direct avec ses titres phares. Dès les premières notes, on plonge dans son monde hyperpop : des beats saturés, des voix trafiquées, des mélodies qui vous attrapent et ne vous lâchent plus. La salle entière vibre. C’était magique, vraiment.
Mais ce qui rend ce concert fascinant, c’est justement ce mélange. Par moments, tout est fluide, émotionnel, presque intime malgré la grande salle. Sa voix, traitée avec ces effets si caractéristiques du genre, touche en plein cœur. Et puis, d’un coup, elle bascule dans quelque chose de beaucoup plus radical. Des sons agressifs, des structures qui partent dans tous les sens, une énergie presque punk dans l’approche électronique.
J’ai vu des gens autour de moi complètement hypnotisés, les yeux fermés, en train de danser comme si plus rien n’existait. D’autres, en revanche, semblaient un peu perdus. C’est ça, le risque quand on propose une musique aussi expérimentale en live : on ne laisse personne indifférent.
L’évolution impressionnante depuis le début de la tournée
Ce qui m’a marqué, c’est à quel point le spectacle a gagné en assurance. Au printemps, lors de son concert parisien précédent, tout paraissait encore en construction. Les transitions étaient parfois maladroites, la mise en scène un peu minimaliste. Là, non. Elle a clairement affiné son propos.
Elle a enchaîné les morceaux de son premier album, Choke Enough, sorti en début d’année, avec une maîtrise évidente. Les visuels, les lumières, tout semblait pensé pour amplifier l’expérience. On sentait l’influence de ses dates à l’étranger, cette ouverture sur des scènes plus grandes, plus audacieuses.
Et pourtant, elle a gardé cette touche très personnelle, presque artisanale. Elle produit tout elle-même, écrit, compose. Ça se ressent sur scène : rien n’est formaté pour plaire à tout prix. C’est brut, sincère, parfois déroutant. Mais c’est aussi ce qui fait sa force.
Dans l’hyperpop, on joue avec les extrêmes : la douceur et la violence sonore, la mélodie pop et la distorsion. C’est un équilibre fragile.
Et elle maîtrise cet équilibre, même si parfois il penche d’un côté plus que de l’autre.
Un public conquis et une ambiance unique
Avant même le début du concert, l’effervescence était palpable. Le stand de merchandising était pris d’assaut comme je l’ai rarement vu pour une artiste française. Des hoodies, des vinyles, des tote bags… Tout partait en quelques minutes. Ça en dit long sur l’engouement autour d’elle.
Dans la salle, c’était un mélange de générations, mais majoritairement jeune. Beaucoup connaissaient les paroles par cœur, chantaient à tue-tête. Il y avait cette communion qu’on retrouve dans les concerts de niche, ceux où le public est vraiment investi.
À certains moments, l’émotion était palpable. Sur les titres plus doux, ceux où sa voix flotte presque éthérée, on pouvait entendre une aiguille tomber. Et puis, sur les drops plus violents, la salle explosait. Ce contraste, c’est ce qui a rendu la soirée mémorable.
- Des lumières parfaitement synchronisées avec les beats
- Une présence scénique renforcée, plus assurée
- Des arrangements live qui surprennent par rapport à l’album
- Un public ultra-impliqué du début à la fin
- Des moments d’introspection suivis de pics d’énergie
L’hyperpop français à son apogée ?
Oklou n’est pas arrivée de nulle part. Originaire de Poitiers, Marylou Mayniel – son vrai nom – a construit son univers petit à petit, entre productions maison et collaborations pointues. Son album a été salué partout, remportant même un prix prestigieux qui récompense les talents émergents.
Ce qui est intéressant, c’est comment elle incarne une certaine vague française dans l’hyperpop. Un genre souvent associé à des artistes anglo-saxons, mais qu’elle réinvente avec une sensibilité très européenne, presque mélancolique par moments. Ses textes, en anglais principalement, touchent à l’intime, à la vulnérabilité.
Sur scène, elle ne cherche pas à en faire des tonnes. Pas de chorégraphies millimétrées ou d’effets pyrotechniques. Non, c’est elle, sa voix, ses machines. Et ça suffit largement.
D’ailleurs, un détail qui m’a touché : elle a dédié certains morceaux à des moments personnels de sa vie récente. On sent que l’année a été intense pour elle, entre la tournée, les récompenses, et même une pause pour accueillir son premier enfant. Ça ajoute une couche d’authenticité rare.
Les moments forts du set
Difficile de tout détailler sans spoiler, mais certains titres ont clairement marqué les esprits. Quand elle a lancé ce morceau mid-tempo avec ces vocaux superposés, la salle s’est illuminée de téléphones. Un vrai moment de grâce.
Puis il y a eu ces phases plus expérimentales, où elle pousse les sonorités jusqu’à la distorsion presque noise. Là, c’était plus clivant. Personnellement, j’adore quand un artiste prend des risques. Mais je comprends que ça puisse dérouter ceux qui venaient pour les singles plus accessibles.
Le final, lui, a été explosif. Elle a tout donné, enchaînant trois titres majeurs sans pause. La perruque scintillante sous les stroboscopes, les basses qui faisaient trembler les sièges… On en est sortis sonnés, dans le bon sens du terme.
Pourquoi ce concert marque une étape
Plus qu’un simple show de fin de tournée, ce concert à Pleyel ressemblait à une consécration. Passer dans cette salle mythique, avec un public aussi dévoué, ce n’est pas anodin pour une artiste de cette génération.
Elle a prouvé qu’on pouvait proposer une musique exigeante, innovante, et remplir une grande salle parisienne. Dans un paysage musical français parfois frileux face à l’expérimental, c’est encourageant.
Et puis, il y a cette dimension internationale. Programmée dans des festivals majeurs à l’étranger, acclamée outre-Atlantique… Elle porte haut les couleurs d’une scène électronique française créative.
L’hyperpop, c’est aussi une façon de dire les choses autrement, de mélanger les émotions contradictoires sans les édulcorer.
Et elle le fait avec une honnêteté désarmante.
Ce que j’en retiens personnellement
En sortant de la salle, j’avais cette sensation bizarre : à la fois émerveillé et un peu secoué. C’est rare qu’un concert me laisse cette impression. Pas tiède, pas parfait non plus, mais vivant.
Je pense que c’est exactement ce qu’elle recherchait. Pas un show lisse pour plaire à tout le monde, mais une expérience vraie. Avec ses hauts et ses moments plus abrupts.
Si vous avez raté ce concert, pas de panique : son album tourne en boucle chez moi depuis des mois. Et quelque chose me dit qu’on la reverra bientôt sur des scènes encore plus grandes. Elle a ce truc, cette étincelle qu’ont les artistes destinés à durer.
En attendant, si vous aimez la musique qui ne ressemble à rien d’autre, qui ose, qui touche à la fois le cœur et les tripes… Foncez découvrir son univers. Vous ne ressortirez pas indemnes, mais c’est précisément pour ça que c’est génial.
Et vous, vous avez vu Oklou en live cette année ? Quel moment vous a le plus marqué ? Partagez vos impressions en commentaire, j’ai hâte de lire vos retours.
