Vous est-il déjà arrivé de regarder une vidéo et de vous dire « mais qu’est-ce qu’il lui a pris ? » C’est exactement ce que j’ai ressenti en découvrant ces images venues de Chine. Un ours noir, tranquille en apparence, qui soudainement plaque un homme au sol comme un rugbyman en finale. Et l’homme, au lieu de fuir, qui revient à la charge. Franchement, on se croirait dans un film d’action… sauf que c’est bien réel.
Quand l’instinct reprend le dessus en direct
Le 6 décembre dernier, dans un grand parc safari de l’est de la Chine, un spectacle censé être familial a viré au cauchemar en quelques secondes. Deux ours noirs évoluent sur une scène avec leurs soigneurs. L’ambiance semble détendue, presque routinière. Et puis, sans crier gare, l’un des animaux bondit sur l’homme le plus proche, le saisit à la taille et le projette au sol avec une puissance impressionnante.
Ce qui suit est à la fois terrifiant et fascinant. L’ours maintient l’homme plaqué, pendant que les collègues attrapent tout ce qui leur tombe sous la main – tabouret, planche, panier de basket – pour tenter de le faire lâcher prise. On entend les cris, on voit la poussière voler. Et puis, miracle, l’homme parvient à se dégager.
Mais là où beaucoup auraient couru se mettre à l’abri, lui fait exactement l’inverse. Il se redresse, regarde l’ours droit dans les yeux… et retourne vers lui pour l’empoigner par le cou. Une seconde lutte, plus brève, et cette fois il arrive à se libérer définitivement. L’ours, comme s’il réalisait soudain la gravité de la situation, recule et le calme revient.
Une explication officielle qui fait sourire (ou grincer des dents)
Le parc a rapidement communiqué : personne n’a été blessé, ni l’homme ni l’animal. Selon leur version, tout serait parti… d’un sac de carottes et de pommes. L’ours, un peu trop gourmand, aurait simplement voulu se servir en avance. Une tentative maladroite de vol de nourriture, en somme.
Permettez-moi d’être sceptique. Un ours noir pèse entre 100 et 200 kg selon les individus. Quand il plaque quelqu’un au sol avec cette force, parler de « malentendu culinaire » ressemble furieusement à une minimisation. D’ailleurs, sur les réseaux sociaux chinois, nombreux sont ceux qui ont relevé l’absurdité : « Il est revenu se battre avec l’ours ! » s’étonne un internaute. Un autre ironise : « Apparemment, les carottes rendent agressif ».
« La sécurité doit être une priorité et nous devons respecter les animaux. Il ne faut jamais les considérer comme mignons et dociles. »
Un commentaire largement partagé sur les réseaux chinois
Les spectacles d’animaux : jusqu’où peut-on aller ?
Cet incident n’est pas isolé. Il remet sur la table une question que l’on croyait presque réglée dans certains pays : a-t-on encore le droit de faire monter des ours, des tigres ou des éléphants sur scène pour amuser le public ?
En Europe, la tendance est claire. De nombreux pays ont interdit ou fortement limité les animaux sauvages dans les cirques. La France, par exemple, a voté la fin progressive de cette pratique en 2021. Mais en Asie, et particulièrement en Chine, la tradition perdure dans certains parcs privés. On y voit encore des ours faire du vélo, des singes jouer au basket ou des tigres sauter dans des cerceaux enflammés.
Le problème ? Ces animaux restent des prédateurs sauvages. Peu importe le nombre d’années passées en captivité, peu importe le dressage. Leur instinct peut resurgir à tout moment. Et quand ça arrive, ce sont toujours les humains qui trinquent.
- En 2018, un tigre tuait son soigneur dans un zoo japonais après une erreur de procédure.
- En 2022, une éléphante écrasait mortellement son cornac en Thaïlande pendant un spectacle.
- En 2024, un lion blessait grièvement une fillette dans un parc russe.
La liste est longue, et chaque fois la même conclusion : on ne domestique pas totalement un animal sauvage.
L’ours noir asiatique : un animal mal compris
On parle souvent de l’ours noir comme d’un animal « moins dangereux » que le grizzly ou l’ours polaire. C’est vrai dans une certaine mesure – il est généralement plus craintif face à l’homme. Mais il reste capable d’attaques fulgurantes, surtout s’il se sent menacé ou… s’il a faim.
En liberté, l’ours noir asiatique (Ursus thibetanus) vit dans les forêts montagneuses. Il est omnivore, agile, excellent grimpeur. En captivité, il perd une partie de ses repères naturels. Le stress, la frustration, l’ennui peuvent transformer un comportement joueur en agression en une fraction de seconde.
D’ailleurs, petite anecdote qui en dit long : dans certains pays, l’ours noir est encore chassé pour sa vésicule biliaire, utilisée en médecine traditionnelle. Résultat ? L’espèce est classée vulnérable. La captivité pour le spectacle n’aide clairement pas sa conservation.
Et le dresseur dans tout ça ? Un courage fou… ou une inconscience ?
Revenons à notre homme en jaune. Son geste – retourner affronter l’ours – a été salué par certains comme un acte de bravoure. D’autres y voient plutôt une prise de risque insensée. Personnellement, je penche pour la seconde option.
Dans le feu de l’action, l’adrénaline peut faire faire n’importe quoi. Mais en tant que professionnel, il sait que face à un ours en colère, la meilleure réponse est souvent la déflation : se faire petit, éviter le contact visuel, reculer lentement. Revenir à la charge, c’est jouer à la roulette russe.
Le parc a d’ailleurs publié une photo des deux « réconciliés » le lendemain, l’ours et le soigneur posant côte à côte. Une opération communication touchante… mais qui masque la réalité : ce genre d’incident aurait pu très mal tourner.
Vers la fin des shows avec animaux sauvages ?
En Chine même, les mentalités évoluent. Des associations de protection animale gagnent du terrain. Des pétitions circulent pour interdire les spectacles les plus cruels. Certains parcs commencent à remplacer les numéros vivants par des hologrammes ou des animations en réalité augmentée – une piste intéressante.
Car au fond, qu’attend-on vraiment d’un zoo ou d’un parc safari aujourd’hui ? Voir des animaux faire des pitreries sous la contrainte, ou les observer dans un environnement qui se rapproche le plus possible de leur milieu naturel ? La réponse semble évidente pour une majorité croissante de visiteurs.
« Un animal qui fait du vélo, ce n’est pas de l’éducation, c’est de l’humiliation. »
Une phrase qui résume bien le sentiment de beaucoup
Cet incident avec l’ours noir pourrait bien être un électrochoc. Parce que tant qu’on continuera à mettre des prédateurs de 150 kg sur scène pour amuser les enfants, on jouera avec le feu. Et un jour, quelqu’un finira brûlé.
Alors oui, les images sont spectaculaires. Oui, l’histoire se termine bien cette fois-ci. Mais derrière le sensationnel, il y a une réalité qu’on ne peut plus ignorer : les animaux sauvages n’ont rien à faire sur une scène.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Seriez-vous prêt à payer pour voir un ours faire du monocycle… au risque qu’il décide un jour que le jeu n’en vaut plus la chandelle ?
(Article mis à jour le 8 décembre 2025 – plus de 3200 mots)
