Il y a des périodes où rien ne veut sourire. Quatre petites victoires depuis l’ouverture du meeting d’hiver, c’est maigre, très maigre quand on s’appelle Alexandre Abrivard et qu’on a l’habitude de jouer les premiers rôles sur la cendrée de Vincennes. À titre de comparaison, certains collègues tournent à plus de vingt succès sur la même période. Forcément, ça cogne dans la tête.
Pourtant, le bonhomme ne se cache pas derrière des excuses toutes faites. Il l’assume, cash, sans détour : oui, il traverse un trou, oui, la confiance en prend un coup, mais non, il ne va pas se morfondre pour autant. Dimanche, il retrouve une jument qu’il connaît par cœur, Just Love You, dans le Prix du Bourbonnais, deuxième manche qualificative pour le graal absolu, le Prix d’Amérique. L’occasion parfaite de remettre les pendules à l’heure ?
Un début de meeting qui fait mal à la tête
Reprenons depuis le début. Quand le meeting d’hiver ouvre ses portes début novembre, tout le petit monde du trot attelé a les yeux rivés sur Vincennes. C’est là que tout se joue, là que les réputations se font ou se défont. Et cette année, pour Alexandre, ça a démarré en mode diesel… voire en mode panne sèche.
Quatre victoires seulement en un mois et demi, c’est peu, trop peu pour un driver de son calibre. Lui qui nous avait habitués à enchaîner les performances de haut vol se retrouve soudain à courir après les accessits, parfois même à sortir bredouille. Alors forcément, les questions fusent : manque de chance ? Chevaux moins compétitifs ? Problème de feeling ? Un peu de tout ça, sans doute.
« Je ne peux pas me plaindre » répète-t-il pourtant, presque comme un mantra. « J’ai des chevaux corrects à driver, je suis en bonne santé, la famille va bien… Il y a pire dans la vie. »
C’est tout lui, ça. Une forme d’humilité et de recul qu’on retrouve rarement dans ce milieu ultra-concurrentiel où l’ego prend parfois des proportions démesurées. Mais derrière cette façade zen, on sent quand même que ça le travaille. Parce que oui, quand on est compétiteur, ne pas gagner, ça ronge.
La comparaison qui fait mal
Et puis il y a les chiffres, implacables. Quand tu vois un Éric Raffin empiler les victoires comme d’autres collectionnent les timbres, forcément, tu te poses des questions. Le roi Raffin, intouchable en ce moment, semble avoir trouvé la recette magique : le bon cheval au bon moment, la bonne tactique, le petit soupçon de réussite qui fait toute la différence.
Alexandre, lui, court après cette alchimie. Il a beau tout essayer – attaquer tôt, patienter, prendre les bons dos –, rien n’y fait. Le cheval qui semblait imbattable finit cinquième, celui qu’on jouait en bout de combinaison termine dernier. C’est le genre de série noire qui peut vous miner le moral plus sûrement qu’une suspension de quinze jours.
Just Love You, la jument de la dernière chance ?
Et puis arrive ce dimanche. Le Prix du Bourbonnais. Un Groupe II qui compte double : d’abord parce qu’il distribue des points précieux pour la qualification au Prix d’Amérique, ensuite parce qu’il peut servir de déclic psychologique. Et pour Abrivard, la monture n’est pas anodine : Just Love You, une jument qu’il connaît mieux que quiconque.
Cette fille de Ready Cash n’est pas n’importe qui. Lauréate du Prix de Paris l’an dernier, elle reste sur une rentrée correcte dans le Prix du Languedoc où elle a montré qu’elle revenait en forme. À Vincennes, sur les 2850 mètres de la grande piste, avec son numéro 5 derrière les ailes de l’autostart, tous les feux sont au vert… ou presque.
- Elle adore la grande piste de Vincennes
- Elle monte en condition après sa rentrée
- Elle sera déferrée des quatre pieds (toujours un plus)
- Alexandre la connaît par cœur
Mais dans le trot attelé, rien n’est jamais acquis. Il y aura du monde au départ : des chevaux en pleine possession de leurs moyens, des drivers revanchards, des tactiques de course qui peuvent tout bouleverser en quelques foulées. Un faux départ, une faute au heat, un rival qui vous bouche la route au moment clé… Tout peut basculer en un instant.
Le mental, cette variable oubliée
Ce qu’on oublie souvent quand on regarde une course de l’extérieur, c’est le facteur mental. Un driver qui doute, même légèrement, peut hésiter une demi-seconde de trop. Et dans une arrivée au trot attelé, une demi-seconde, c’est une longueur, parfois deux. C’est toute la différence entre la victoire et la quatrième place qui ne rapporte presque rien.
Alexandre le sait mieux que personne. Il l’a déjà vécu dans l’autre sens : ces périodes où tout sourit, où le cheval semble voler, où chaque décision semble être la bonne. Là, c’est l’inverse. Le moindre petit doute se transforme en montagne. Alors il positif, il respire, il se répète que ça va tourner.
« Dimanche, j’ai une très belle carte à jouer. Si je fais les choses simplement, sans me prendre la tête, ça peut le faire. Just Love You est prête, moi aussi. »
On sent dans sa voix cette envie farouche de renverser la vapeur. Pas de déclarations tonitruantes, non, juste cette détermination tranquille de celui qui sait que son heure va revenir. Et quand on connaît le bonhomme, on sait qu’il ne lâchera rien.
Et si c’était le déclic tant attendu ?
Imaginez la scène : Just Love You qui sort parfaitement du tournant final, qui prend l’avantage à deux cents mètres du but, Alexandre qui lève le bras, enfin, le sourire retrouvé, la confiance qui revient d’un seul coup. Un scénario hollywoodien ? Peut-être. Mais dans le trot attelé, ces retournements de situation arrivent plus souvent qu’on ne le pense.
Parce qu’au fond, c’est ça la beauté de ce sport : tout peut basculer en une course. Une seule victoire, et tout redevient possible. Les doutes s’envolent, les critiques se taisent, le driver retrouve sa place parmi les meilleurs. C’est exactement ce dont Alexandre Abrivard a besoin en ce moment.
Alors oui, il y aura de la pression dimanche. Oui, il y aura des regards posés sur lui. Mais il y aura surtout un driver déterminé à prouver que cette mauvaise passe n’est qu’un accident de parcours. Et quand on connaît l’histoire du trot attelé, on sait que les plus grands come-backs commencent souvent par un dimanche comme celui-ci.
Allez Alexandre, on croit en toi. La cendrée de Vincennes a vu bien pire que ça se relever. Et quelque chose me dit que Just Love You pourrait bien être la jument qui va tout changer.
Et vous, vous en pensez quoi ? Vous jouez Just Love You en tête du quinté dimanche ? Ou vous voyez plutôt un autre cheval créer la surprise ? Dites-moi tout en commentaire, on en discute ensemble avant le grand jour !
