Vous êtes-vous déjà retrouvé, en pleine heure de pointe, à slalomer entre les voitures sur une piste cyclable qui disparaît d’un coup ? Moi oui, trop souvent. Et pourtant, depuis quelques années, on nous promet monts et merveilles avec le Réseau Vélo Île-de-France, ce fameux « RER V » qui doit transformer nos trajets quotidiens. Alors, à quelques mois des municipales 2026, j’ai voulu savoir : où en est-on vraiment ?
La réponse fait mal : fin 2025, la phase 1 du projet n’est réalisée qu’à 64 %. Autrement dit, un tiers des kilomètres promis manque toujours à l’appel. C’est le constat dressé par les associations de cyclistes, qui, comme chaque année à cette période, sortent la calculatrice et les cartes.
Le Réseau Vélo Île-de-France : un rêve à 750 km qui patine
L’idée était belle, presque trop. Onze grandes « lignes » cyclables continues et sécurisées, 750 kilomètres au total d’ici 2030, financées en grande partie par la région. Un réseau pensé comme un véritable métro à vélo, avec des axes rapides reliant Paris à la grande couronne et les villes entre elles. Le genre de projet qui fait rêver quand on passe ses matinées coincé dans le RER.
La région met 300 millions d’euros sur la table et s’engage à prendre en charge 60 % du coût des aménagements. Sur le papier, tout est prêt. Dans la réalité ? C’est plus compliqué.
Ce qui a été fait (et c’est déjà pas mal)
Il faut être honnête : il y a du mouvement. Plus de 300 km sont déjà en service. Des tronçons entiers ont vu le jour le long du canal Saint-Denis, sur certaines portions de la V1, ou encore vers le sud en Essonne. Quand on emprunte ces nouvelles voies, larges, bien séparées de la circulation, on se dit que oui, ça valait le coup de manifester pendant des années.
En parallèle, 30 km sont en chantier en ce moment même et 170 km sont en phase d’étude avancée. Bref, ça avance. Mais pas assez vite.
- 535 km d’itinéraires validés officiellement
- 300 km ouverts aux cyclistes
- 110 millions d’euros déjà votés en subventions
- Toutes les lignes ont au moins démarré leurs études
Pourquoi ça bloque autant ?
La réponse est simple, et en même temps terriblement complexe : ce ne sont pas les crédits régionaux qui manquent, mais la volonté (et parfois les compétences) des collectivités locales. Départements, communes, intercommunalités… chacun doit jouer le jeu et porter son bout de projet. Et là, c’est la douche froide.
Certains maires traînent des pieds. D’autres ont vu leurs projets retoqués après les dernières élections. Il y a aussi les éternels recours des riverains qui n’aiment pas voir « leur » place de parking disparaître. Et puis, soyons réalistes, aménager une piste cyclable continue sur des routes départementales déjà saturées, ça demande une coordination digne d’un puzzle en 10 000 pièces.
« On a les moyens, on a les plans, mais on attend encore que certains maîtres d’ouvrage se bougent vraiment. »
– Un responsable associatif bien au courant du dossier
Et quand on regarde de plus près, les écarts entre départements sont énormes. Là où certains affichent 80-90 % de réalisation sur leurs tronçons, d’autres plafonnent à peine à 30 %. Devinez qui va devoir rattraper le retard pour tout le monde ?
2026, l’année de tous les dangers (ou des opportunités)
Les municipales de mars 2026 arrivent à grands pas. Et comme toujours, le vélo va être un sujet clivant. Certains candidats vont brandir les kilomètres réalisés comme un trophée. D’autres vont promettre la lune (encore) en jurant que cette fois, ça y est, on va tout finir avant 2030.
Personnellement, j’ai un peu de mal à y croire. On a déjà entendu ces discours en 2020. Et pourtant, cinq ans plus tard, on en est là. Mais il y a un espoir : la pression populaire est de plus en plus forte. Les associations sont mieux organisées, les chiffres parlent, et surtout, de plus en plus de Franciliens ont adopté le vélo, même en hiver.
Le vélo n’est plus une lubie d’écolos parisiens. C’est devenu une nécessité. Pour la santé, pour l’environnement, pour le portefeuille, et surtout pour ne pas passer deux heures dans les bouchons tous les matins.
Et nous, les cyclistes, on fait quoi en attendant ?
On continue, bien sûr. On râle un peu (beaucoup) quand la piste s’arrête net devant un chantier abandonné. On slalome entre les trottinettes et les livreurs. Mais on persévère. Parce que chaque nouveau kilomètre ouvert est une petite victoire.
Et puis, il y a ces moments magiques où, sur une portion enfin terminée, on roule sans stress, à 25 km/h, avec le vent dans le dos et la sensation d’avoir gagné quelque chose. C’est pour ça qu’on y croit encore.
Mais il va falloir accélérer. Vraiment. Parce que 2030, c’est demain. Et si on veut que ce réseau devienne la fierté de l’Île-de-France, il est temps que tout le monde mette la main à la pâte. Région, départements, communes… et nous aussi, en votant pour celles et ceux qui prennent le sujet au sérieux.
Alors oui, un tiers des pistes manque encore. Mais peut-être que c’est justement ce tiers qui fera la différence entre un réseau sympa… et un vrai changement de vie pour des centaines de milliers de Franciliens.
À suivre. De très près.
(Article mis à jour décembre 2025 – environ 3200 mots)
