Imaginez-vous debout à côté d’une girafe adulte. Son cou s’élève à plus de six mètres, et vous, vous faites figure de petit point en bas. C’est cette sensation vertigineuse que ressentent les soigneurs tous les jours dans un zoo du nord de la France. Après trente longues années sans ces géants paisibles, les girafes font leur grand retour. Et franchement, c’est le genre de nouvelle qui redonne le sourire en cette fin d’année.
Un retour très attendu au cœur de la ville
Le parc animalier d’Amiens, niché tout près du centre-ville, vient de franchir une étape majeure dans son développement. Deux jeunes mâles, encore adolescents dans le monde des girafes, ont posé leurs sabots dans un tout nouvel espace conçu spécialement pour eux. L’un arbore une robe plutôt claire, l’autre plus sombre – des détails qui trahissent leurs origines légèrement différentes. Ce qui les unit ? Ils appartiennent à des sous-espèces particulièrement menacées.
Ce n’est pas tous les jours qu’un zoo urbain de cette taille accueille à nouveau des animaux aussi emblématiques. Les visiteurs les plus fidèles attendaient ce moment depuis le départ des dernières résidentes, il y a trois décennies. On sent une vraie excitation dans l’air, même si pour l’instant, tout se passe en coulisses.
Qui sont ces deux nouveaux arrivants ?
Appelons-les simplement les deux jeunots pour l’instant. L’un a tout juste passé l’année et demie, l’autre approche des deux ans. Ils arrivent de parcs réputés du sud et de l’ouest de la France, où ils sont nés. Leur voyage jusqu’ici marque le début d’une nouvelle aventure, mais aussi une contribution concrète à la préservation de leur espèce.
Ce qui frappe d’abord, c’est leur taille déjà impressionnante. À cet âge, ils culminent autour de trois mètres cinquante. Rien que ça ! Pourtant, ils ont encore de la marge : les mâles adultes peuvent dépasser les six mètres. Quand on les observe depuis une passerelle surélevée, on comprend vite pourquoi les soigneurs parlent de se sentir « comme une fourmi ».
À côté d’eux, on se sent comme une fourmi.
– Une soigneuse expérimentée
Cette phrase résume parfaitement l’impression que laissent ces animaux. Calmes, élégants, presque méditatifs dans leurs mouvements lents. Mais ne vous y trompez pas : derrière cette apparente tranquillité se cache une grande sensibilité au changement.
Un bâtiment pensé pour leur bien-être
Avant de découvrir le grand air, nos deux protégés profitent d’un cocon intérieur ultra-moderne. Imaginez un vaste espace de plus de trois cents mètres carrés, avec une hauteur sous plafond de huit mètres. De quoi leur permettre de se déplacer sans jamais se sentir à l’étroit.
Le bâtiment est chauffé pour maintenir une température agréable, même quand l’hiver picard montre les dents. Des aérothermes veillent à ce que tout reste autour de quinze degrés. Le sol est recouvert d’une épaisse couche de paille, confortable et hygiénique. Plusieurs loges individuelles et une grande zone commune permettent de gérer les interactions au fur et à mesure.
- Loges individuelles pour habituer progressivement les animaux
- Espace commun capable d’accueillir quatre adultes et leurs petits
- Baie panoramique pour les visiteurs dès la réouverture
- Râteliers suspendus pour le foin, à la bonne hauteur
Cette conception réfléchie n’est pas un luxe. Les girafes détestent le stress. Tout est fait pour que l’adaptation se passe en douceur : mouvements calmes des soigneurs, approches progressives, routines bien établies.
Les repas, par exemple, sont un vrai rituel. Granulés de luzerne, légumes frais – carottes, oignons, choux –, bambou et foin à volonté. Quelques morceaux de pomme servent d’appât pour les entraînements médicaux futurs. Parce que oui, même un géant a besoin de check-up réguliers.
Des espèces en danger critique d’extinction
Derrière l’émerveillement, il y a une réalité plus dure. Les deux jeunes mâles représentent des sous-espèces classées en danger critique. La girafe de Nubie et la girafe de Kordofan voient leurs populations fondre dans la nature, victimes du braconnage, de la perte d’habitat et des conflits.
Leur présence ici s’inscrit dans un programme européen de conservation coordonné par une association regroupant les grands parcs animaliers. L’objectif ? Maintenir une population viable en captivité, échanger des individus entre institutions, et surtout sensibiliser le public.
À mon avis, c’est l’un des aspects les plus intéressants de ce genre d’initiative. On ne parle pas seulement d’exhiber des animaux magnifiques. On participe activement à leur survie. Et quand on voit le soin apporté à chaque détail, on sent que l’équipe y croit vraiment.
Tout le monde est content de leur arrivée. Certains visiteurs les attendent depuis le départ des dernières.
– Un responsable des collections animales
Cette attente du public montre à quel point les girafes marquent les esprits. Enfants comme adultes, tout le monde rêve de lever la tête pour croiser leur regard curieux.
Une future plaine africaine de 6000 m²
Pour l’instant, tout se passe à l’intérieur. Mais au printemps, une grande révélation attend nos deux amis : une immense plaine de six mille mètres carrés, recréant un paysage africain avec herbe, terre et sable.
Ils ne seront pas seuls. Gazelles gracieuses, autruches imposantes, grues couronnées élégantes… L’idée est de recréer un écosystème où chaque espèce trouve sa place. Ce genre de cohabitation mixte enrichit le comportement des animaux et offre aux visiteurs une vision plus fidèle de la savane.
En attendant, les deux jeunots observent les derniers travaux depuis leurs baies vitrées. On les voit s’approcher, curieux, tendant leur long cou pour mieux voir les ouvriers. C’est touchant de constater cette complicité naissante entre eux. Ils se suivent, jouent doucement, explorent chaque recoin.
L’évolution remarquable du parc amiénois
Ce retour des girafes couronne un vaste projet d’extension lancé il y a plusieurs années. Le parc s’étend désormais sur sept hectares et accueille plus de sept cents animaux représentant cent vingt espèces. Tout ça à deux pas du centre-ville – un luxe rare.
L’année qui vient de s’écouler a d’ailleurs battu tous les records de fréquentation, avec un quart de million de visiteurs. La présence de grands félins rares y est pour beaucoup, mais l’arrivée des girafes promet de booster encore les chiffres dès la réouverture en février.
- 2018 : lancement du programme d’extension
- Années suivantes : agrandissement progressif et nouveaux habitats
- 2025 : record de fréquentation historique
- 2026 : ouverture de la plaine africaine et retour des girafes
On voit bien que le parc ne se repose pas sur ses lauriers. Chaque nouvelle étape vise à améliorer le bien-être animal tout en proposant une expérience plus immersive aux visiteurs.
Le quotidien des soigneurs avec ces géants
Travailler avec des girafes, ce n’est pas un métier comme les autres. L’équipe compte cinq personnes dédiées, bientôt six. Chacun apprend à connaître les caractères, les petites manies. L’une des soigneuses s’est même déplacée dans un autre parc pour accompagner l’un des jeunes avant son transfert.
Le maître-mot ? Patience. Ces animaux n’aiment pas les gestes brusques. Tout doit être fluide, prévisible. Quand on remplit les mangeoires ou qu’on ajuste les rations, on bouge lentement, on parle doucement. En retour, on reçoit ces regards paisibles qui valent tous les discours.
Ce qui me touche particulièrement, c’est cette relation de confiance qui se construit jour après jour. Un morceau de pomme tendu au bon moment, un contact visuel prolongé… Ce sont ces petits riens qui créent du lien.
Pourquoi ce retour marque les esprits
Plus qu’un simple événement zoologique, ce retour symbolise quelque chose de plus grand. Dans un monde où les espèces disparaissent à un rythme alarmant, chaque naissance, chaque transfert réussi compte. Ces deux jeunes mâles portent en eux l’espoir de voir leurs sous-espèces perdurer.
Et puis, il y a l’aspect humain. Les familles qui viendront admirer ces géants, les enfants qui poseront mille questions, les adultes qui repartiron avec une prise de conscience nouvelle sur la fragilité de la nature. C’est ça aussi, la mission d’un parc moderne.
Personnellement, j’ai toujours trouvé que les girafes avaient quelque chose d’hypnotique. Cette démarche lente, ce cou qui semble défier les lois de la physique, ces yeux doux bordés de longs cils. Elles nous rappellent qu’il existe encore de la grâce dans ce monde.
Le printemps prochain promet d’être mémorable. Quand les portes de la plaine s’ouvriront, quand ces deux adolescents fouleront l’herbe pour la première fois sous les yeux émerveillés des visiteurs… Ce sera sans doute l’un de ces moments dont on se souvient longtemps.
En attendant, le travail continue en coulisses. Les soigneurs veillent, les animaux s’acclimatent, le public trépigne. Tout un écosystème qui se remet en place, pièce par pièce. Et au centre de tout ça, deux girafes qui, sans le savoir, portent un message d’espoir pour leur espèce entière.
Si vous passez dans le nord cet hiver, gardez un œil sur les annonces de réouverture. Parce que voir une girafe de près, ça change un peu la perspective sur la vie. Et ça, ça n’a pas de prix.
