Imaginez la scène. San Mamés, ce chaudron basque qui gronde, un match de Ligue des champions où chaque ballon peut peser une saison entière. Et là, au milieu de tout ça, un gardien russe et un défenseur ukrainien qui se retrouvent côte à côte pour la première fois sous le même maillot. Franchement, quand on m’a dit que ça arriverait un jour au PSG, j’ai haussé les sourcils. Pas vous ?
Pourtant, mercredi soir, c’est bien ce qui s’est passé. Matvey Safonov dans les cages, Illya Zabarnyi qui entre à la pause à la place d’un Marquinhos sonné. Et le résultat ? Un 0-0 propre, solide, presque ennuyeux pour le spectateur neutre… mais tellement chargé de symboles pour qui veut bien regarder un peu plus loin que le tableau d’affichage.
Quand le football rappelle qu’il peut être plus grand que la politique
Je ne vais pas vous refaire l’histoire. Tout le monde sait ce qui se passe entre la Russie et l’Ukraine depuis février 2022. Ce conflit, on le vit au quotidien dans les journaux, dans les débats, parfois même autour de la table familiale. Alors quand le PSG décide de recruter Zabarnyi pour plus de 60 millions alors que Safonov est déjà là… comment dire… ça sentait le coup médiatique un peu chaud.
Et pourtant. Sur le terrain, rien. Pas un regard de travers, pas une passe ratée par principe, pas la moindre tension visible. Quatre minutes après l’entrée du défenseur ukrainien, première relance vers son gardien russe. Propre. Puis une deuxième. Puis dix. Comme si c’était la chose la plus naturelle du monde.
À un moment, j’ai presque souri devant mon écran. Parce que voilà : pendant que certains cherchaient la petite bête en conférence de presse, deux gamins de 25 et 22 ans faisaient simplement leur boulot. Et plutôt bien.
Safonov, la revanche discrète d’un gardien sous-côté
Revenons un peu en arrière. Matvey Safonov, c’est ce grand blond arrivé l’été dernier avec l’étiquette « doublure de luxe ». On se souvient tous de ce match cauchemardesque à Munich l’an passé. Une sortie complètement ratée, un but encaissé, et hop, retour sur le banc pour le reste de la saison.
Moi, j’ai toujours pensé qu’on l’avait jugé un peu vite. Le mec sort d’une saison énorme en Russie, il a 25 ans, il est souple comme un chat et il a ce calme olympien dans les cages qui manque parfois à certains numéros 1. Contre Bilbao, il n’a pas eu dix arrêts décisifs à faire, c’est vrai. Mais sur les rares situations chaudes, il a répondu présent.
Je me souviens surtout de cette sortie aérienne en première mi-temps sur un coup franc excentré. Timing parfait, poings solides, et tout le monde respire. C’est ça, un gardien rassurant. Pas besoin de sortir vingt parades de fou pour imposer le respect.
« Je m’attendais à la concurrence et je m’y attends toujours. Mon objectif est de prouver à chaque match et à chaque entraînement que je mérite ma place. »
Matvey Safonov, en septembre dernier
Cette phrase prend tout son sens aujourd’hui. Deux clean sheets en deux matchs depuis qu’il a sa chance. Ça commence à faire sérieux.
Zabarnyi, l’énorme coup qui commence à payer
De l’autre côté, Illya Zabarnyi. 67 millions d’euros, c’est pas une broutille. Quand le PSG a lâché cette somme, beaucoup ont crié au scandale. Moi le premier, je me suis demandé si on n’avait pas payé un peu cher le mètre 94 ukrainien.
Et puis je l’ai vu jouer. Ce garçon a une lecture du jeu hallucinante pour son âge. Il anticipe, il couvre, il relance proprement. Contre Bilbao, il entre en cours de match, dans un contexte compliqué, avec tout le poids symbolique dont on parle… et il fait ça avec une sérénité dingue.
- Première intervention : il gratte un ballon dans les pieds d’un attaquant basque
- Deuxième : il sort proprement de la pression avec une passe laser vers Zaïre-Emery
- Troisième : il gagne son duel aérien et relance directement vers l’avant
En vingt minutes, il a montré pourquoi le club a misé si gros. Et surtout, il a montré qu’il était là pour jouer, pas pour faire de la figuration ou de la politique.
Un duo qui pourrait devenir une référence
Ce qui m’a le plus marqué, c’est la complémentarité évidente entre les deux. Safonov est très fort sur sa ligne et dans les sorties hautes. Zabarnyi, lui, couvre énormément de terrain et gagne presque tous ses duels. Si Luis Enrique arrive à les faire jouer régulièrement ensemble, on pourrait bien tenir quelque chose de très costaud.
Parce que soyons honnêtes : la défense parisienne, ces dernières années, c’était parfois un peu l’aventure. Entre les blessures, les méformes et les expérimentations tactiques, on a vu de tout. Là, avec un axe Zabarnyi-Hakimi (ou Beraldo, ou qui sais-je) devant Safonov, ça commence à ressembler à quelque chose de solide.
Et puis il y a ce côté humain. Deux garçons qui viennent de pays en guerre, qui portent le même maillot, qui se passent le ballon sans arrière-pensée. Dans un monde où tout est politique, c’est presque rafraîchissant. Non ?
Luis Enrique avait raison (encore)
On se souvient tous de cette conférence de presse où il s’était agacé quand on lui avait parlé de polémique potentielle. « Il a été malade les deux derniers jours. Mais je sais que c’est plus important de chercher la polémique tout le temps », avait-il lâché, passablement énervé.
Sur le moment, certains l’avaient trouvé sec. Moi, je trouvais qu’il avait raison. Parce que franchement, on allait quand même pas psychoter pendant six mois sur le fait que deux joueurs professionnels fassent leur travail ? Apparemment si. Mais le terrain a parlé.
Luis Enrique, lui, il s’en fout des histoires. Il veut des joueurs qui bossent, qui performent, qui s’intègrent. Point. Et pour l’instant, les deux recrues répondent présent. C’est tout ce qui compte.
Et maintenant ?
La grande question, c’est : est-ce qu’on va revoir ce duo régulièrement ? Marquinhos devrait revenir vite, mais avec la densité du calendrier, les rotations vont être inévitables. Et puis, il y a cette petite musique qui commence à monter : et si Safonov finissait par gratter la place de numéro 1 ?
Deux clean sheets en deux matchs, c’est pas rien. Surtout quand on sait que le titulaire habituel est un champion d’Europe en titre. La concurrence, ça vivifie, dit-on. Au PSG, elle est plus que jamais lancée dans les cages.
Quant à Zabarnyi, sa prestation de mercredi a dû calmer pas mal de sceptiques. 67 millions, ça commence à faire moins cher payé quand on voit le garçon évoluer avec autant de maturité.
Au final, ce 0-0 à Bilbao, on s’en souviendra peut-être moins pour le spectacle (il n’y en a pas eu beaucoup) que pour ce qu’il représente. Deux joueurs, deux pays en conflit, un même maillot, une même envie de gagner. Le football, parfois, il nous rappelle pourquoi on l’aime tant.
Et moi, je suis prêt à parier que ce n’est que le début d’une belle histoire entre Safonov et Zabarnyi. Parce que sur un terrain, il n’y a plus de drapeaux. Il n’y a que des coéquipiers.
Le foot, putain, qu’est-ce qu’il peut être beau quand il veut.
