Il y a des buts qui valent plus que trois points. Il y a ces instants où un joueur, dos au mur, sent que tout peut basculer en une fraction de seconde. Dimanche soir, au Groupama Stadium, Martin Satriano a vécu ça. Et franchement, on était nombreux à retenir notre souffle quand ce ballon a flotté dans la surface nantaise.
Parce que soyons honnêtes : l’Uruguayen arrivait avec une étiquette un peu lourde. Prêté par Brest où il avait montré des choses intéressantes, puis un passage raté à Lens, et enfin ce transfert à Lyon censé être le tremplin. Résultat ? Zéro but en douze apparitions. Des occasions manquées, des têtes qui fuient le cadre, des frappes qui s’envolent. Le genre de série noire qui peut vous bouffer un attaquant.
Le retourné qui a fait taire les doutes
Et puis il y a eu cette 60e minute environ. Lyon mène déjà 1-0 grâce à Vinicius Abner, mais le match reste ouvert. Centre depuis la droite, déviation astucieuse de Pavel Sulc au premier poteau et… Satriano, dos au but, entouré de deux défenseurs, qui se jette.
Ce n’est pas un geste proprement dit « scolaire ». Le tibia prend le ballon de plein fouet, presque par instinct de survie. Le corps est désaxé, en torsion maximale, et pourtant la frappe est propre, puissante, précise. Le ballon fuse en lucarne opposée. Anthony Lopes, pourtant excellent depuis le début de saison, ne peut que l’accompagner du regard.
Un but comme ça, ça ne s’explique pas, ça se vit. Il a senti le moment, il s’est jeté, et le reste appartient à l’histoire du club.
Un observateur dans les tribunes
Une disette de 17 matchs enfin terminée
Pour bien mesurer l’exploit, il faut remettre les chiffres en perspective. Satriano restait sur 17 matchs consécutifs sans marquer toutes compétitions confondues. Son dernier but ? C’était encore sous le maillot brestois, il y a presque un an. À Lyon, il avait tenté, souvent, mais jamais réussi à conclure.
Les stats font mal :
- 12 matchs avec l’OL avant Nantes
- 0 but, 0 passe décisive
- Seulement 4 tirs cadrés
- Expected Goals cumulés : à peine 1,8
Autant dire que le garçon jouait avec le frein à main. Et quand on porte le numéro 9 dans un club comme Lyon, la pression est décuplée.
Le doublé qui valide la délivrance
Mais le plus beau, c’est que Satriano n’a pas tremblé après son chef-d’œuvre. Quelques minutes plus tard, sur un débordement d’Afonso Moreira, il se retrouve seul face au but. Là où certains auraient vendangé par excès d’envie, lui reste calme. Plat du pied sécurité, 3-0. Le break définitif.
Le Groupama Stadium, déjà chauffé à blanc par les fumigènes déployés pour les 75 ans du club, entre en fusion. On sent que quelque chose vient de se débloquer, pas seulement pour le joueur, mais pour tout un vestiaire.
Pourquoi ce match était particulier
Nantes, c’était l’adversaire idéal pour se relancer. Une équipe en difficulté à l’extérieur, une défense parfois fébrile. Mais au-delà du contexte sportif, il y avait cette célébration d’anniversaire. Les tribunes ont répondu présent, les anciens étaient là, l’ambiance était lourde d’attentes.
Et Satriano a compris qu’il n’avait plus le choix. Soit il rentrait dans le rang, soit il saisissait l’instant. Il a choisi la deuxième option. Avec la manière.
Que change ce doublé pour l’OL ?
Sur le plan comptable, Lyon repasse 6e et se replace dans la course à l’Europe. Rien d’exceptionnel encore, mais la dynamique change. Avec ce succès, les Gones enchaînent une troisième victoire consécutive à domicile. Le Groupama Stadium redevient une forteresse.
Sur le plan collectif, ça soulage aussi Paulo Fonseca. L’entraîneur portugais avait pris la défense de son attaquant à plusieurs reprises, répétant qu’il fallait « du temps et de la patience ». Aujourd’hui, il a sa récompense.
Et maintenant ? Le vrai test commence
Un but, même magnifique, ne fait pas une carrière. Un doublé ne transforme pas un joueur moyen en phénomène. Mais ce soir-là, Satriano a montré qu’il avait les nerfs et la technique pour jouer dans un grand club.
Les prochains matchs seront révélateurs. Face à des défenses plus solides, dans des contextes moins favorables, saura-t-il répéter ce genre de performance ? C’est tout le défi qui l’attend. Mais une chose est sûre : il vient de se donner de l’air. Beaucoup d’air.
Un profil taillé pour la Ligue 1 ?
On oublie parfois que Satriano n’a que 23 ans. Formé à l’Inter Milan, international U20 uruguayen, il a déjà montré par séquences qu’il pouvait être dangereux. À Brest, il avait inscrit 4 buts en 15 matchs la saison dernière malgré un temps de jeu limité.
Son profil ? Un attaquant complet : bon jeu dos au but, capable de décrocher, assez explosif pour les appels en profondeur et, comme on l’a vu, une frappe de balle hors norme quand il se lâche. Reste à trouver la régularité. Et à Lyon, on sait que ça ne pardonne pas.
Les images qui rester/blink restent
Dans vingt ans, quand on reparlera des plus beaux buts de l’histoire récente de l’OL, celui-ci sera dans le top 5, c’est certain. Le ralenti est hypnotique : l’envol, la torsion du corps, le contact franc, la trajectoire parfaite. Même les supporters nantais, sur les réseaux, ont reconnu la beauté du geste.
Et puis il y a cette célébration, bras écartés, regard vers le ciel, comme pour dire merci. Merci au destin, merci au foot, merci d’avoir enfin répondu présent.
Ce genre de moment, ça ne s’oublie pas. Ni pour lui, ni pour nous qui l’avons vécu depuis les tribunes ou devant notre écran. Le football, parfois, c’est aussi simple que ça : un geste, une explosion de joie, et tout qui repart.
Welcome back, Martin. On t’attendait.
