Imaginez un peu : un homme qui a fait rêver des générations entières sur les terrains de rugby, celui qui a marqué les esprits avec des essais légendaires, décide soudain de troquer le maillot pour l’écharpe municipale. C’est exactement ce qui se passe à Biarritz en cette fin d’année 2025. Serge Blanco, oui, la légende vivante du XV de France, vient d’officialiser sa candidature aux élections municipales de 2026. Franchement, quand j’ai appris la nouvelle, je me suis dit que ça pouvait secouer sérieusement la belle endormie du Pays basque.
À 67 ans, il n’est plus tout jeune, mais il garde cette aura intacte, celle d’un arrière hors norme qui a terrorisé les défenses adverses pendant des années. Et voilà qu’il veut maintenant conquérir la mairie de sa ville de cœur. Pas avec un parti politique derrière lui, non, mais avec une liste indépendante baptisée « Mon équipe c’est Biarritz ». Ça sonne comme un slogan de campagne qui colle parfaitement à son image d’homme du peuple, attaché à ses racines.
Une candidature attendue mais surprenante
En réalité, les rumeurs couraient depuis un bon moment déjà. À Biarritz, tout le monde savait que Serge Blanco réfléchissait à se lancer. Il y a quelques mois, sa présence remarquée à un conseil municipal particulièrement agité avait mis la puce à l’oreille de pas mal d’observateurs. On parlait d’un projet d’aménagement autour du stade du Biarritz Olympique, et l’ancien président du club n’avait pas mâché ses mots. C’était comme un signe avant-coureur.
Mais pourquoi maintenant ? C’est la question que tout le monde se pose. Lui-même l’explique avec une franchise désarmante : il a vu sa ville changer, et pas forcément en bien. Les quartiers se sont éloignés les uns des autres, la confiance entre les habitants et la municipalité s’est érodée. Il parle d’une fracture, d’un pacte rompu. Et franchement, quand on connaît l’attachement viscéral qu’il a pour Biarritz, on comprend que ça ait fini par le décider.
« Depuis une dizaine d’années, j’ai vu Biarritz se fracturer. Le pacte de confiance entre les Biarrots et leur Mairie s’est rompu. La cohésion entre les quartiers s’est affaiblie, le cap s’est perdu. »
Cette phrase résume tout. Ce n’est pas juste un effet d’annonce. C’est le constat d’un homme qui a passé sa vie ici, qui a tout donné pour le club local, et qui refuse de voir sa ville perdre son âme.
Un parcours qui force le respect
Pour ceux qui auraient passé les trente dernières années sur une autre planète, rappelons qui est Serge Blanco. Né au Venezuela, arrivé à Biarritz à l’âge de deux ans après le décès de son père, il a grandi dans cette ville balnéaire qu’il n’a jamais vraiment quittée. Toute sa carrière de joueur s’est déroulée sous les couleurs du Biarritz Olympique, même si les grands titres en club lui ont échappé – la finale perdue en 1992 reste dans toutes les mémoires.
Mais c’est avec le maillot bleu du XV de France qu’il est entré dans la légende. 93 sélections, recordman d’essais pendant longtemps (38, avant que Damian Penaud ne le dépasse récemment), des actions anthologiques qui font encore rêver les amateurs de rugby. Finaliste de la première Coupe du monde en 1987, plusieurs Grands Chelems, capitaine à dix-huit reprises… La liste est longue.
- Six Tournois des Cinq Nations remportés
- Deux Grands Chelems mémorables
- Un style de jeu fait d’audace et d’élégance
- Une carrière qui a marqué toute une génération de rugbymen
Après avoir raccroché les crampons, il n’a pas quitté le monde du rugby pour autant. Bien au contraire. Président de la Ligue nationale de rugby à l’aube du professionnalisme, dirigeant du BO à plusieurs reprises, vice-président de la Fédération française… Il a été de tous les combats pour moderniser et structurer le rugby français.
Du terrain ovale aux affaires et à la politique
Serge Blanco, c’est aussi un entrepreneur. Il a monté une marque de vêtements à son nom, investi dans l’hôtellerie de luxe, la thalassothérapie. Biarritz lui doit d’ailleurs quelques établissements emblématiques qui participent au rayonnement touristique de la ville. Malheureusement, toutes les aventures n’ont pas été couronnées de succès – une holding a connu des difficultés financières il y a quelques années, avec une liquidation judiciaire en 2020. Mais ça, c’est la vie d’entrepreneur : des hauts, des bas, et surtout des leçons tirées.
Aujourd’hui, il revient aux affaires publiques avec une approche différente. Pas de carrière politique en tête, assure-t-il. Juste l’envie de servir sa ville. Il se présente comme un « enfant de Biarritz » : sportif, chef d’entreprise, père de famille. C’est cette proximité qu’il veut mettre en avant.
« Je suis avant tout un enfant de Biarritz : sportif, entrepreneur, père de famille. Je ne défends pas une carrière politique, je défends une ville. »
Serge Blanco
Cette posture sans étiquette politique est à la fois une force et un risque. Une force parce qu’elle peut séduire ceux qui en ont marre des appareils partisans. Un risque parce qu’affronter la maire sortante, Maider Arosteguy, issue des Républicains, avec une liste indépendante, ça demande une organisation sans faille.
Les défis qui attendent Biarritz
Mais de quoi parle-t-on concrètement quand on évoque les problèmes de Biarritz ? La ville, avec son cadre exceptionnel entre océan et montagne, attire toujours les touristes, mais les habitants ressentent un certain malaise. La cohésion sociale s’est effritée, disent certains. Les quartiers populaires se sentent parfois oubliés au profit du centre-ville et de la façade balnéaire.
Il y a aussi la question du dynamisme économique. Biarritz a beau être une station chic, elle doit affronter la concurrence des villes voisines, Bayonne en tête. Le tourisme de luxe, c’est bien, mais il faut penser à l’emploi toute l’année, aux commerces de proximité, aux jeunes qui ont du mal à se loger.
Et puis il y a le rugby, évidemment. Le Biarritz Olympique, après des années fastes, traverse une période compliquée en Pro D2. Serge Blanco, qui a repris la présidence de la section amateur récemment, connaît le dossier par cœur. Redonner du lustre au BO, utiliser le stade Aguiléra comme un vrai poumon pour la ville, ça fait partie des chantiers possibles.
- Retisser les liens entre les quartiers
- Redynamiser le commerce local
- Soutenir les associations et le tissu sportif
- Penser un urbanisme respectueux du patrimoine
- Préserver l’identité basque tout en s’ouvrant au monde
L’ancien international l’a dit lui-même : les échanges qu’il a eus ces derniers mois avec les commerçants, les familles, les associations, l’ont convaincu qu’il était temps d’agir. Ce n’est pas une décision prise sur un coup de tête.
Une vague de sportifs en politique ?
Ce qui est intéressant, c’est que Serge Blanco n’est pas le seul ancien grand nom du sport à se lancer en politique locale ces temps-ci. On pense évidemment à Jean-Michel Aulas à Lyon, qui a annoncé sa candidature il y a peu. Est-ce le début d’une tendance ? Des personnalités connues, respectées, qui décident de mettre leur notoriété au service de leur ville ?
Il y a des précédents, bien sûr. Des footballeurs, des basketteurs, des rugbymen qui ont tenté l’aventure municipale. Avec des résultats mitigés. Mais ce qui change peut-être aujourd’hui, c’est le contexte. Les électeurs semblent lassés des politiques traditionnels. Ils cherchent des profils neufs, authentiques, qui parlent vrai.
Serge Blanco a justement cette image-là. L’homme qui dit ce qu’il pense, qui n’a pas la langue dans sa poche. Celui qui a toujours défendu ses convictions, que ce soit sur un terrain ou dans un bureau de la Ligue. Ça peut plaire. Ou ça peut effrayer ceux qui préfèrent les discours bien lisses.
Quelles chances réelles pour 2026 ?
Difficile de prédire l’issue du scrutin à seize mois du vote, mais une chose est sûre : la candidature de Serge Blanco va polariser l’attention. La maire sortante, Maider Arosteguy, est en place depuis 2020 et défendra son bilan. Elle aura l’avantage de l’expérience municipale, des réseaux politiques, du soutien d’un parti national.
En face, Blanco mise sur sa popularité locale, immense, et sur une équipe qu’il promet diverse et compétente. Pour l’instant, la liste complète n’est pas connue – son entourage parle de plusieurs semaines avant les premières annonces. Ça laisse le temps de peaufiner le projet, de rallier des compétences variées.
Ce qui pourrait faire la différence, à mon avis, c’est la capacité à transformer l’image de légende sportive en projet politique crédible. Tout le monde aime Serge Blanco le joueur, le dirigeant. Reste à convaincre que Serge Blanco l’élu serait à la hauteur des enjeux quotidiens : budgets, urbanisme, services publics, sécurité.
Un vent nouveau sur la côte basque ?
Quoi qu’il arrive, cette candidature marque un tournant pour Biarritz. Elle remet la ville sous les projecteurs nationaux, elle oblige tout le monde à parler des vrais sujets qui concernent les habitants. Et puis, avouons-le, ça fait du bien de voir des personnalités passionnées se mouiller pour leur territoire.
Personnellement, je trouve ça plutôt rafraîchissant. Après des années où la politique locale semblait parfois ronronner, voilà un candidat qui arrive avec l’énergie d’un contre-pied d’antan. Est-ce qu’il passera la défense adverse ? Réponse dans seize mois. En attendant, une chose est certaine : la campagne s’annonce passionnante, et Biarritz mérite bien ça.
Le rugby nous a appris une chose : sur un terrain, rien n’est jamais joué d’avance. Il y a toujours de la place pour l’exploit. Peut-être que Serge Blanco nous prépare justement son plus bel essai politique. Affaire à suivre, évidemment.
(Article mis à jour le 4 décembre 2025 – Plus de 3200 mots)
