Imaginez-vous devant votre propre maison, frapper comme une étrangère pendant que quelqu’un, à l’intérieur, appelle la police… contre vous. C’est exactement ce qui arrive à Chantal, une retraitée de Bagnolet, un vendredi soir de novembre. Et le pire ? Les agents finissent par lui demander, à elle, de quitter les lieux. Bienvenue dans l’absurdité totale du squat en France en 2025.
Quand la loi protège plus l’occupant que le propriétaire
Depuis le mois de juin, une partie du pavillon familial est occupée par une jeune femme que la famille n’a jamais vue avant. Le studio, initialement destiné à loger un proche ou à être loué proprement, est devenu un domicile « inviolable » aux yeux de la justice. Et quand la propriétaire tente simplement de discuter, c’est elle qui passe pour l’intruse.
Ce genre d’histoire, on croit toujours que ça n’arrive qu’aux autres. Et pourtant, elles se multiplient. J’ai moi-même du mal à y croire quand on me la raconte, alors la vivre au quotidien… ça doit être un cauchemar éveillé.
La « bonne foi » : le bouclier juridique imprenable
Le nœud du problème ? La préfecture a refusé d’ordonner l’expulsion immédiate car elle n’a pas pu « exclure la bonne foi » de l’occupante. Autrement dit : si la personne prétend avoir cru, même de façon totalement farfelue, qu’elle avait le droit d’entrer, la machine judiciaire se grippe complètement.
Concrètement, ça donne ça :
- La famille apporte les titres de propriété, factures EDF, taxes foncières : rien n’y fait.
- La police constate l’occupation illégale mais repart les mains vides.
- Le préfet, censé trancher rapidement, botte en touche.
- Et pendant ce temps, l’eau et l’électricité continuent de tourner… sur le compteur des propriétaires.
On marche sur la tête, non ?
Six mois de galère et un logement dégradé
Six mois. C’est le temps qu’a déjà duré cette occupation. Six mois où Chantal et sa fille Sandrine tournent en rond entre avocats, commissariat et préfecture. Six mois où le studio, pourtant refait à neuf il y a peu, part en ruine : vitres cassées, murs abîmés, détritus qui s’accumulent.
« On a tout refait avant, c’était nickel. Maintenant c’est dégueulasse, on n’ose même plus regarder. »
– Sandrine, fille de la propriétaire
Et quand elles tentent de rentrer pour constater les dégâts ou simplement récupérer des affaires personnelles laissées là, c’est la panique chez l’occupante. Résultat : gyrophare dans la rue et propriétaire priée de circuler.
Je vous jure, parfois la réalité dépasse la fiction la plus sombre.
La trêve hivernale, ce cadeau empoisonné qui arrive
Cerise sur le gâteau : on approche du 1er novembre. La fameuse trêve hivernale va bientôt démarrer. Même si, par miracle, un juge ordonnait l’expulsion d’ici là, elle serait suspendue jusqu’au 31 mars. Soit potentiellement dix mois au total d’occupation gratuite et protégée.
Dix mois où les propriétaires continuent de payer les charges, l’assurance habitation, la taxe foncière… pour quelqu’un d’autre. Vous avez dit injustice ?
Comment en est-on arrivé là ?
Revenons un peu en arrière. La loi anti-squat de 2020 était censée régler le problème en accélérant les expulsions en cas de flagrants délits. Sur le papier, c’était plutôt bien fichu. En pratique ? Les interprétations divergentes des préfectures et les recours possibles transforment la procédure express en parcours du combattant.
Ajoutez à ça la jurisprudence qui protège farouchement le domicile – même illégal – et vous obtenez ce genre de situations ubuesques où la victime devient presque suspecte.
L’aspect le plus révoltant, à mon sens ? Le deux poids deux mesures. Quand un locataire ne paie pas son loyer, l’expulsion peut prendre des années. Quand un propriétaire se fait squatter son bien, c’est parfois encore pire.
Et les voisins dans tout ça ?
Dans le quartier, l’ambiance est lourde. Certains voisins évitent désormais la rue par peur des tensions. D’autres, solidaire, apportent café et croissants aux propriétaires quand ils font le siège devant chez eux. C’est touchant, mais ça ne règle rien.
Une riveraine m’a confié hors micro : « On a tous peur que ça nous arrive un jour. On ferme nos volets plus tôt maintenant. » L’insécurité, elle n’est pas que physique, elle est aussi juridique.
Que faire quand la loi vous lâche ?
Alors, concrètement, quelles solutions reste-t-il à cette famille ?
- Attendre une décision de justice classique (18 à 24 mois minimum)
- Tenter la conciliation (qui échoue 9 fois sur 10 dans ce genre de cas)
- Payer un huissier pour constater, encore et encore
- Et prier pour que l’occupante parte d’elle-même un jour
C’est mince. Très mince.
Certains propriétaires, à bout, finissent par céder et revendent à perte. D’autres laissent pourrir le bien en espérant que ça décourage l’occupant. Pathétique, non ?
Un problème national qui prend de l’ampleur
Bagnolet n’est pas un cas isolé. De la Bretagne à la Côte d’Azur, les histoires similaires se multiplient. Des retraités qui perdent leur maison de vacances. Des héritiers bloqués sur un bien familial. Des investisseurs qui jettent l’éponge.
Et pendant ce temps, le parc immobilier privé se rétrécit. Moins de biens à louer, loyers qui flambent, tension sur le marché… Tout le monde y perd, finalement. Sauf l’occupant, bien sûr.
Vers une réforme, vraiment ?
On nous promet régulièrement des durcissements. Peines plus lourdes, expulsions plus rapides, suppression de la notion de bonne foi dans certains cas. Mais à chaque fois, les associations de défense du droit au logement montent au créneau et le texte est édulcoré.
Résultat ? On reste dans ce flou artistique où le propriétaire est présumé coupable jusqu’à preuve du contraire. Triste époque.
En attendant, Chantal continue de frapper à sa porte. Sandrine enchaîne les nuits blanches. Et quelque part en Seine-Saint-Denis, une famille pleure la perte d’un bout de son histoire.
Parce qu’au-delà des aspects juridiques, c’est ça le vrai drame : un bien qui porte les souvenirs de plusieurs générations, souillé et inaccessible. Et personne, absolument personne, ne semble pouvoir y faire quoi que ce soit.
Si ça, ce n’est pas le monde à l’envers…
(Article mis à jour le 3 décembre 2025 – l’histoire est malheureusement toujours en cours)
