Vous est-il déjà arrivé de rentrer d’un déplacement complètement vidé, lessivé par une énième défaite, et de vous retrouver nez à nez avec plusieurs centaines de supporters en colère ? Non ? Moi non plus. Mais c’est exactement ce qu’ont vécu les joueurs de l’OGC Nice dans la nuit de dimanche à lundi.
Une scène qui rappelle les heures les plus sombres du football français, quand la passion déborde et que le dialogue laisse place aux mains qui s’égarent. Franchement, on croyait ce genre d’images réservé aux années 90 ou aux championnats plus au sud. Et pourtant, en 2025, voilà le Gym plongé dans une crise qui va bien au-delà des résultats sportifs.
Une défaite de trop qui met le feu aux poudres
Reprenons depuis le début. Dimanche après-midi, Nice se déplace à Lorient avec l’espoir de enfin stopper l’hémorragie. Six défaites de suite toutes compétitions confondues, une place de barragiste, un vestiaire qui grince… L’équation était claire : il fallait ramener quelque chose du Moustoir.
Raté. Les Aiglons s’inclinent 3-1, performance insipide, buts encaissés évitables, attaquants transparents. Le genre de match qui vous fait zapper directement sur le classement en rentrant dans le bus. Et pendant le trajet retour, l’ambiance doit être glaciale. Personne n’ose parler, tout le monde sait que ça va chauffer à l’arrivée.
Et ça n’a pas loupé.
400 âmes devant les grilles à 23 heures
Vers 23 heures, le bus approche du centre d’entraînement des Plaines du Var. À peine les phares éclairent-ils l’allée que l’on comprend : il y a du monde. Beaucoup de monde. Environ 400 supporters, fumigènes allumés, écharpes déployées, chants qui claquent dans la nuit.
Le ton est donné dès les premières secondes :
« Bougez-vous le cul ! »
Le message martelé en boucle, repris par toute la foule. Pas vraiment une invitation à discuter autour d’un café. Les joueurs descendent un par un, protégés tant bien que mal par une poignée de stadiers et membres de la sécurité du club. La tension est palpable.
Quand certains joueurs deviennent des cibles personnelles
Très vite, deux noms reviennent dans les chants et les invectives : Terem Moffi et Jérémie Boga. Les deux attaquants, déjà critiqués pour leur manque d’implication ces dernières semaines, cristallisent la colère.
Moffi voit son bonnet arraché dès les premiers mètres. Selon plusieurs témoins, ça ne s’arrête pas là : cheveux tirés, coups dans le dos, et même des gestes plus bas, dans les parties intimes. Le Nigérian avance tête baissée, entouré par la sécurité qui tente de faire bouclier.
Jérémie Boga, lui, traîne une autre casserole : on lui reproche toujours d’avoir offert des places à des supporters marseillais lors du fameux 1-5 contre l’OM. Dans l’esprit de certains ultras, c’est une trahison. Résultat : l’Ivoirien prend aussi des coups, à la tête, au torse, et là encore dans des zones particulièrement sensibles.
On parle d’une dizaine de coups pour chacun des deux joueurs. Rien de cassé, heureusement, mais l’humiliation est totale. Et surtout, le message est passé : ici, on ne pardonne plus.
Franck Haise, le seul à garder la tête haute
Dans ce chaos, une figure sort grandie : Franck Haise. L’entraîneur, qui avait publiquement proposé d’être « l’électrochoc » après la claque contre Marseille, descend du bus sous les applaudissements. Les ultras l’acclament, scandent son nom.
Et lui, il ne fuit pas. Il reste presque une heure à discuter avec les supporters les plus virulents. Calme, posé, à l’écoute. Certains joueurs font de même : Sofiane Diop, Melvin Bard, Ali Abdi ou Tom Louchet prennent le temps d’échanger. Morgan Sanson un peu moins, mais il reste présent.
À l’opposé, le directeur sportif Florian Maurice doit être exfiltré rapidement. Bousculé, insulté, il file vers le parking sous escorte renforcée. Quant au président Fabrice Bocquet, il brille par son absence : il a filé directement à l’aéroport après l’atterrissage, voiture l’attendant sur le tarmac. Symbole fort, ou plutôt faiblesse assumée.
Un club au bord de l’implosion
Ce qui s’est passé cette nuit-là n’est pas qu’un simple coup de colère passager. C’est le symptôme d’un mal plus profond. Depuis le rachat par INEOS, les supporters niçois ont l’impression de ne plus reconnaître leur club. Projet sportif flou, recrutement critiqué, identité perdue… La goutte d’eau, c’est cette série noire qui place le Gym en position de relégable virtuel.
- 6 défaites consécutives toutes compétitions confondues
- 17es de Ligue 1, barragiste
- Attaque stérile malgré un effectif théoriquement talentueux
- Ambiance délétère dans le vestiaire
- Direction invisible ou fuyante
Quand on additionne tout ça, on comprend mieux pourquoi 400 personnes ont jugé nécessaire de venir « discuter » à minuit passé.
Et maintenant ?
Mardi matin, le silence radio est total. Ni le club, ni les joueurs, ni même les groupes de supporters n’ont communiqué officiellement. On imagine que la LFP va se pencher sur le dossier, peut-être des sanctions à venir pour le club qui n’a pas su sécuriser correctement l’arrivée de son équipe.
Du côté des joueurs ciblés, la question est de savoir s’ils porteront plainte. Pour l’instant, rien n’a filtré. Mais une chose est sûre : l’image de l’OGC Nice prend un nouveau coup. On parle déjà d’une réunion de crise en début de semaine entre dirigeants, staff et capitaines.
Ce qui est certain, c’est que le prochain match à domicile contre Saint-Étienne s’annonce bouillant. Les supporters ont montré qu’ils étaient prêts à tout pour se faire entendre. Reste à savoir si le message est passé… ou s’il va falloir une nouvelle démonstration.
Parce qu’au fond, c’est ça le plus triste dans cette histoire : un club historique, une ville passionnée, un public parmi les plus chauds de France… et tout ça qui part en vrille à cause d’une spirale négative que personne ne semble capable d’enrayer.
Le football, parfois, ça fait mal. Très mal.
