Vous êtes-vous déjà promené dans une rue où chaque coin semble cacher un secret ? À Creil, dans l’Oise, l’avenue Jules-Uhry, près de la gare, est devenue le théâtre d’un commerce illicite qui prospère sous les regards indiscrets des passants… et des caméras. Ce n’est pas une scène de film noir, mais une réalité quotidienne : le trafic de cigarettes de contrebande y bat son plein, défiant les autorités locales. Récemment, un jeune homme de 20 ans a été condamné grâce à la vidéosurveillance, une technologie devenue l’arme clé dans cette lutte sans fin. Mais ce cas isolé soulève une question : peut-on vraiment enrayer ce fléau ?
Un Commerce Illégal Bien Ancré à Creil
Creil, ville dynamique de l’Oise, est connue pour sa gare, l’une des plus fréquentées du département. Mais derrière cette effervescence, une économie parallèle prospère. L’avenue Jules-Uhry, artère principale près de la gare, est depuis des années un haut lieu de la vente à la sauvette. Les cigarettes de contrebande, souvent importées illégalement, y sont écoulées à bas prix, attirant une clientèle variée. Ce commerce, bien que discret, est devenu une véritable épine dans le pied des autorités.
Le trafic de cigarettes est un problème récurrent dans les zones urbaines à fort passage. Il prospère grâce à la demande constante et à l’organisation des réseaux.
– Expert en sécurité urbaine
Pourquoi ce trafic est-il si difficile à endiguer ? D’abord, il repose sur une logistique bien huilée. Les revendeurs, souvent jeunes et en situation précaire, limitent les risques en ne transportant que de petites quantités. Les stocks sont cachés dans des endroits ingénieux : façades de magasins, recoins d’immeubles, ou même à l’intérieur de bars complices. Ensuite, la proximité de la gare offre un flux constant de clients potentiels, rendant le commerce quasi invisible dans la foule.
La Vidéosurveillance : Une Arme à Double Tranchant
Dans cette lutte contre le trafic, la vidéosurveillance joue un rôle central. À Creil, le Centre de supervision urbaine scrute les images des caméras installées dans les zones sensibles. Lors d’une patrouille virtuelle en janvier 2024, un comportement suspect a attiré l’attention : un jeune homme, que nous appellerons Sofiane pour préserver son anonymat, multipliait les allers-retours entre un bar et une cache. Les images, nettes, ont révélé des échanges rapides de paquets de cigarettes, parfois accompagnés de petits sachets suspects.
En vingt minutes, quatre transactions ont été filmées. Sofiane, interpellé sur place, n’avait sur lui que deux paquets de cigarettes de contrebande, une stratégie courante pour minimiser les peines en cas d’arrestation. Mais les images ne mentaient pas : elles ont constitué une preuve accablante devant le tribunal de Senlis.
- Précision : Les caméras capturent des détails cruciaux, comme les gestes d’échange.
- Rapidité : Les opérateurs peuvent alerter la police en temps réel.
- Efficacité : Les enregistrements servent de preuves solides en justice.
Mais la vidéosurveillance a ses limites. Si elle permet de repérer des individus, elle ne s’attaque pas aux racines du problème : la demande pour ces produits à bas prix et l’organisation des réseaux d’approvisionnement. De plus, certains habitants s’inquiètent de l’impact sur la vie privée. Est-ce que vivre sous l’œil constant des caméras est le prix à payer pour plus de sécurité ? Personnellement, je trouve l’équilibre délicat : la sécurité est essentielle, mais la sensation d’être surveillé en permanence peut peser.
Sofiane : Un Profil Typique des Revendeurs
Sofiane, 20 ans, n’est pas un criminel endurci. Lors de son procès en juin 2025, il a livré un témoignage qui éclaire le profil de ces petits revendeurs. « J’étais en galère, sans boulot, » a-t-il expliqué. Pour lui, vendre des cigarettes était une solution rapide pour joindre les deux bouts. Une histoire qu’on entend souvent dans les zones où le chômage touche particulièrement les jeunes.
Beaucoup de jeunes se lancent dans ce trafic par nécessité, pas par vocation. Mais une fois dedans, il est dur d’en sortir.
– Sociologue spécialisé dans les dynamiques urbaines
Sofiane a été condamné à trois mois de prison avec sursis, une peine relativement clémente. Il assure avoir tourné la page, travaillant désormais en intérim. Mais son cas illustre une réalité plus large : pour chaque revendeur arrêté, un autre prend sa place. Pourquoi ? Parce que les causes profondes – précarité, manque d’opportunités – restent intactes.
Un Risque Sanitaire Sous-Estimé
Le trafic de cigarettes ne se limite pas à un problème économique ou sécuritaire. Ces produits, souvent fabriqués dans des conditions douteuses, représentent un risque sanitaire majeur. Sans contrôle qualité, ils peuvent contenir des substances toxiques bien plus dangereuses que celles des cigarettes légales. Pourtant, leur prix attractif – parfois deux fois moins cher – séduit une clientèle prête à fermer les yeux sur ces dangers.
| Aspect | Cigarettes légales | Cigarettes de contrebande |
| Contrôle qualité | Réglementé | Aucun |
| Prix moyen | 10-12 €/paquet | 5-7 €/paquet |
| Risques sanitaires | Élevés | Très élevés |
Ce constat m’interpelle : en achetant ces cigarettes, les consommateurs jouent à la roulette russe avec leur santé. Mais peut-on leur reprocher de chercher à économiser dans un contexte où tout augmente ? C’est un dilemme complexe, où la responsabilité se partage entre les individus, les réseaux de contrebande et les politiques publiques.
Les Défis d’une Lutte Efficace
Face à ce fléau, les autorités locales multiplient les efforts. Outre la vidéosurveillance, des patrouilles régulières et des opérations ciblées visent à dissuader les revendeurs. Mais les résultats restent mitigés. Pourquoi ? Parce que le trafic de cigarettes s’inscrit dans un réseau international bien plus vaste. Les produits transitent par des filières organisées, souvent liées à d’autres formes de criminalité comme le trafic de stupéfiants.
- Renforcer les contrôles aux frontières : Limiter l’entrée de cigarettes illégales.
- Sensibiliser les consommateurs : Informer sur les risques sanitaires.
- Offrir des alternatives : Créer des opportunités pour les jeunes en difficulté.
Ces solutions semblent évidentes, mais leur mise en œuvre est un casse-tête. Par exemple, renforcer les contrôles douaniers demande des ressources importantes, tandis que la sensibilisation peine à atteindre ceux qui priorisent le prix à la santé. Quant aux alternatives pour les jeunes, elles nécessitent des investissements à long terme, loin des résultats immédiats exigés par l’opinion publique.
Un Problème Ancré dans la Société
En y réfléchissant, ce trafic est le symptôme d’un malaise plus profond. À Creil, comme ailleurs, la précarité pousse certains à des solutions illégales. La gare, point de passage stratégique, devient un microcosme où se croisent toutes les tensions de la société : inégalités, quête de survie, et parfois, désespoir. Sofiane, avec son sursis et son job en intérim, incarne ce paradoxe : une volonté de s’en sortir, mais un système qui ne facilite pas toujours la réinsertion.
Et les caméras, alors ? Elles capturent, elles accusent, mais elles ne résolvent rien seules. Leur rôle est crucial, mais sans une approche globale – économique, sociale, sanitaire – le trafic continuera de prospérer. À Creil, l’avenue Jules-Uhry reste un lieu de passage, mais aussi un miroir de nos défis collectifs.
La lutte contre le trafic illégal ne se gagne pas seulement dans les rues, mais aussi dans les politiques qui donnent de l’espoir aux plus vulnérables.
Alors, que retenir de cette affaire ? Que la vidéosurveillance est un outil puissant, mais pas une baguette magique. Que les revendeurs comme Sofiane sont souvent des pions dans un jeu bien plus grand. Et que, tant que la demande existera, l’offre trouvera toujours un chemin. À nous, en tant que société, de réfléchir à des solutions qui ne se contentent pas de punir, mais qui préviennent.
La prochaine fois que vous passerez près d’une gare animée, jetez un œil aux coins d’ombre. Qui sait ce que les caméras y capturent ?
